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Page:Charles De Coster - Légendes Flamandes.djvu/254

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Altesse Royale et Palatine que l’heure du pacte n’a point encore sonné. Adoncques, s’il plaît ainsi à Votre Mafesté, je passerai sus terre le bref temps qui me reste à vivre. »

— « Je le veux, » répondit le diable.

Cependant Smetse semblait ne pouvoir ôter ses yeux du diable et il paraissait grandement triste et marri, et il hochait la tête disant aucunes fois :

« Las ! las ! dur tourment, cruel mal heur ! » Et il soupirait bien profondément.

— « Quel mal te point ? » dit le diable.

— « Je, Sire, » répondit Smetse, « ne pâtis mal aucun, sinon la grande douleur que j’ai de voir combien Dieu vous fut sévère, vous laissant ès enfers la maladie de laquelle vous mourûtes. Ha, c’est un bien pitoyable spectacle de voir un grand roi comme vous fûtes rongé de ces poux et dévoré de ces apostèmes. »

— « Il ne me chault de ta pitié, » répondit le roi.

— « Sire, » dit Smetse poursuivant son propos. « daignez ne point mal juger mes paroles. Je ne fus oncques instruit ès belles manières de dire ; non obstant ce, j’ose compâtir à votre illustre souffrance, et ce d’autant plus que je connais, pour l’avoir pâti, votre mal ; et vous pouvez, Sire, en voir encore sus ma peau les marques épouvantables. » Et Smetse, découvrant sa