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Page:Charles De Coster - Légendes Flamandes.djvu/257

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beaucoup céans, disant auprès de mon lit les prières des agonisants ; mon corps était plein de douleur et mon âme de désespérance. Je m’avisai toutefois de prier mon benoît patron et jurai que s’il me tirait de cettuy estrif, je lui brûlerais en Saint-Bavon une telle chandelle que la graisse de vingt moutons ne pourrait suffire à la façon. Et je ne priai point en vain, Sire, car soudain un trou se fit dans le plafond au-dessus de ma tête, une vive lumière, un parfum céleste emplirent la chambre, un sac descendit par le trou, un homme vêtu de blanc suivit le sac, marcha en l’air jusques à mon lit, jeta bas les draps qui me couvraient, et avant que j’eusse eu le temps de cligner de l’œil, me mit dans le sac et en tira les cordons autour de mon col. Mais voyez-ci le miracle : aussitôt vêtu de ce bon chanvre, voici qu’une douce chaleur me pénètre, mes ulcères se ferment et mes poux crèvent très tous avec un bruit terrible. L’homme alors souriant me narre le fait du chanvre céleste et des fèves angéliques, et finit son propos me disant : « Conserve ce remède, Monsieur saint Joseph te l’envoie. Quiconque en usera sera guéri de tous maux et sauvé pour toute l’éternité, s’il ne vend entretandis son âme au diable. » Puis l’homme s’en fut. Et il ne m’a point trompé, le bon messager, car avec l’aide du sac céleste, je guéris Toon, mon manouvrier, des froides humeurs, Pier des fièvres,