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Page:Charles De Coster - Légendes Flamandes.djvu/92

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IV.

Lors, pour ce qu’il était l’aîné de la famille, il lui fallut aller en la cour du comte, afin d’y prendre femme. — Mais chacun s’y était de lui gaussé voyant sa grande laideur, et notamment les dames, lesquelles ricassant entre elles disaient :

« Voyez-ci le beau sire. — Que prétend-il céans ? Il nous vient épouser, je pense. — Quelle en veut pour quatre châteaux, autant de seigneuries, dix mille manants et le pesant d’or du prétendant ? Nulle. — C’est grand pitié : ils procréeraient ensemble beaux enfants, s’ils sont à leur père semblables ! — Ho qu’il a beaux cheveux, le diable les peigna d’un clou ; beau nez, c’est prune ridée et beaux yeux d’azur vif ourlés de gueules merveilleusement. — Ne va il point plourer ? Ce serait belle musique. »

Et le Sire d’Halewyn ouyant ainsi parler les dames ne leur savait mot répondre, car de colère, honte et douleur, il avait la langue épaisse.

Ce nonobstant il voulut à chacun tournoi, tournoyer, mais il était à chacune fois battu avec grande honte, et les