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Page:Cheikh Nefzaoui - Le parfum des prairies (le Jardin parfumé), 1935.djvu/164

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LE PARFUM DES PRAIRIES

La vieille, à peine sortie, rencontra tout près de chez elle un homme grand, bien fait, distingué et richement vêtu. Voilà qui fera bien l’affaire de la femme qui attend chez moi, pensa-t-elle. Aussitôt elle l’accosta :

— Mon Seigneur, je ne suis point surprise de l’amour que tu inspires : ta charmante tournure en a fait rêver plus d’une. Mais béni soit Dieu qui m’a permis de te rejoindre après de nombreuses démarches. Viens chez moi et, tu verras là, une ravissante fille à laquelle tu as fait perdre l’esprit.

— S’il en est ainsi, répondit le beau musulman, marche, je te suis. Prends cette pièce d’or pour ta peine, et, si ma conquête est aussi belle que tu le dis, j’arrondirai ta bourse.

Un instant après, la vieille disait :

— Ma dame, je n’ai pu trouver notre fugitif, mais celui que j’ai entraîné vaut mille fois l’autre.

Et la curieuse, regardant par un trou de la porte, reconnut son mari.

Alors, furieuse, elle s’élança brusquement à sa rencontre et le frappant rudement à la poitrine :

— Misérable, dit-elle, est-ce ainsi que vous me trompez ! Que venez-vous faire ici ? Vous êtes à la