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Page:Cheikh Nefzaoui - Le parfum des prairies (le Jardin parfumé), 1935.djvu/65

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LE JARDIN PARFUMÉ

Pendant qu’elles parlaient ensemble, elles entendirent frapper à la porte.

— Qui est là ? cria la négresse.

— Baboul, répondit-on.

La femme du Vizir pâlit et chancela.

— Que veux-tu ? demanda-t-elle, par le petit trou rond qui sert de croisée.

— Je veux boire un peu d’eau.

Alors la négresse porta au bouffon de l’eau dans une tasse de terre.

Il but et lâcha le vase qui se brisa sur le seuil de la porte que l’esclave referma bien vite. Mais le fol, restant assis à l’extérieur, se mit à pleurer jusqu’au moment où le Vizir vint pour rentrer chez lui.

— Que fais tu là, bouffon ? lui dit-il.

— Écoute ma peine, grand Vizir, que dieu t’accorde ses bienfaits ! Je passais devant ta maison hospitalière ; altéré d’une soif fièvreuse, je frappe et demande à boire ; ton esclave est venue m’ouvrir et m’a donné de l’eau dans une tasse dont tu vois là les débris : la coupe s’est échappée de ma main. Ta femme est venue, furieuse, et elle s’est emparée de la robe du Sultan en disant : Cela paiera ma tasse !