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Page:Cheikh Nefzaoui - Le parfum des prairies (le Jardin parfumé), 1935.djvu/85

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LE JARDIN PARFUMÉ

— Six mois, dit-il, que je te supplie de te donner à moi, et toujours tu remets au lendemain l’accomplissement de mon désir ; mais ma patience est lassée et, pas plus tard que sur l’heure, je vais jouir de toi.

Voyant le nègre complètement ivre et prêt à mettre son projet à exécution, la dame essaie, mais en vain, de le repousser ; il se précipite sur elle, qui, se voyant perdue, se jette à ses pieds et lui dit d’une voix suppliante :

— Ô mon beau Seigneur, attends jusqu’à ce soir, et je serai tout entière à toi ; viens près de moi sur ces coussins brillants, pose ta tête sur mes genoux, et je te bercerai, comme un enfant, en attendant le moment du bonheur.

— Ô Dieu, disait-elle en elle-même, envoyez-moi un homme au cœur valeureux qui me délivre des obsessions de ce démon.

Et prenant sa guitzera, elle se mit à chanter :

Je voudrais un lion jaloux qui m’empêchât d’être à personne,
Armé d’un tota majestueux comme un palmier,
Gros, long, admirablement proportionné à mon zouque,
La tête large comme une orange ;
Enfin si beau qu’il soit unique au monde.