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Page:Chesterton - Le Retour de Don Quichotte.djvu/112

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tout ce que je sais, dit-il ; c’est une question d’optique. C’est une question de physiologie.

Il se pencha soudain par dessus la table et jeta d’une voix sifflante :

— C’est encore plus une question de psychologie pathologique.

— Oh ! dit le visiteur, en attendant ce qui allait suivre.

— Savez-vous, dit Hendry d’une voix soudain calmée, savez-vous pourquoi j’ai perdu tous mes clients ? Savez-vous pourquoi je suis tombé si bas ?

— Autant que je peux le démêler, vous me semblez avoir été diablement maltraité par un certain nombre de gens qui voulaient écouler leur marchandise.

L’expert sourit doucement et secoua la tête.

— C’est une question scientifique, dit-il. Il n’est pas très commode à un docteur de l’expliquer à un profane. Votre amie, voyons, m’avez-vous dit, est la fille de mon vieil ami Ashley. Vous avez là un exemple de la survivance d’une race exceptionnellement saine. Probablement aucune trace de cette tare…

Pendant que ces réflexions, absolument inintelligibles pour Murrel, étaient énoncées avec la même bienveillance doctorale et dédaigneuse, l’attention du visiteur se fixait sur autre chose. Il étudiait avec attention la jeune fille à l’arrière-plan.

Le visage était beaucoup plus intéressant que Murrel ne l’avait soupçonné dans l’obscurité du passage. La jeune fille avait rejeté en arrière les boucles noires qui retombaient sur ses yeux comme les panaches d’un corbillard. Son profil était aquilin, d’une maigreur qui le rendait un peu trop semblable à celui d’un aigle. Mais elle conservait son air de jeunesse