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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/301

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conscience », car celui qui enseigne doit d’abord s’enseigner lui-même. De même qu’un général, s’il n’est d’abord excellent soldat, ne sera jamais un vrai général, de même en est-il de celui qui est instruit. Il dit ailleurs la même chose : « De peur qu’ayant prêché aux autres, je ne sois rejeté moi-même ». (1Cor. 9,27) – « Ayant », dit-il, « la foi et une bonne conscience », afin que par là il soit supérieur à tous les autres. Que ces paroles nous apprennent à ne pas dédaigner les avertissements de ceux qui sont au-dessus de nous, quand nous aurions à enseigner nous-mêmes. Car si Timothée, que nul de nous n’égale, reçoit des avertissements et des enseignements, quoiqu’il soit chargé d’enseigner, combien plus le devons-nous faire. – « Quelques-uns, l’ayant rejetée, ont fait naufrage dans la foi » : Sans doute, car celui qui dit adieu à la vie chrétienne se forme une croyance semblable à ses mœurs, et l’on en peut voir beaucoup qui de là sont tombés dans un abîme de, maux et se sont dévoyés jusqu’au paganisme. Afin de n’être pas tourmentés par la crainte de la vie future, ils s’efforcent de persuader à leur âme que tout est mensonger parmi nous. Et plusieurs se détournent de la foi, en cherchant à tout soumettre à leurs raisonnements. Car c’est ainsi que l’on fait naufrage, tandis que la foi est semblable à une barque impérissable ; ceux qui s’en écartent font nécessairement naufrage.
2. Et l’apôtre l’enseigne par un exemple. « Au nombre desquels », dit-il, « sont Hyménée et Alexandre (20) » ; et il nous enseigne ainsi la prudence. Voyez-vous comment, dès ce temps-là, il existait de faux docteurs, des gens inquiets, qui refusent la foi et veulent tout chercher par eux-mêmes ? Celui qui fait naufrage est dépouillé de tout ; de même à celui qui a perdu la foi, il ne reste rien, ni point d’appui, ni port de refuge, ni une vie dans laquelle il puisse tirer quelque avantage de cet état, car, si la tête est gâtée, à quoi peut servir le reste du corps ? Si la foi sans les mœurs est inutile, combien plus les mœurs sans la foi. Car, si Dieu dédaigne à cause de nous ses propres œuvres, combien plus devons-nous, à cause de lui, dédaigner les nôtres. Il en est ainsi, lorsqu’un homme a perdu la foi ; il ne peut tenir nulle part, mais il flotte de côté et d’autre jusqu’à ce qu’enfin il soit englouti. – « Que j’ai livré à Satan », dit l’apôtre, « afin qu’ils apprennent à ne point blasphémer ». Vous voyez que c’est un blasphème que de soumettre à ses raisonnements les choses divines. Sans doute, car qu’est-ce que le raisonnement humain a de commun avec elles ? Et comment Satan leur apprend-il à ne point blasphémer ? S’il l’apprend aux autres, il devrait bien davantage se l’apprendre à lui-même ;, et s’il ne l’a pu jusqu’à présent, comment le ferait-il pour les autres ?
L’apôtre n’a point dit : Afin que Satan leur enseigne à ne point blasphémer ; mais : « Afin qu’ils l’apprennent ». Ce n’est pas lui qui est l’auteur de cette couvre, elle s’opère par voie de conséquence ; c’est ainsi qu’ailleurs l’apôtre dit du fornicateur : « Livrez-le à Satan » non afin que celui-ci sauve son âme, mais « afin que son âme soit sauvée ».(1Cor. 5,5) Satan n’est pas le sujet du verbe. Comment cela se fait-il ? De même que les bourreaux, forts misérables eux-mêmes, contiennent les autres dans le devoir, ainsi en est-il du mauvais esprit. – Et pourquoi ne les avez-vous pas punis vous-même, comme vous avez puni Bar Jésus, comme Céphas a puni Ananie, mais les avez-vous livrés à Satan ? Pour qu’ils soient instruits plutôt que punis. Paul a cependant de la puissance, comme le jour où il a dit : « Que voulez-vous ? que je vienne vers vous avec la verge ? » (1Cor. 4,21) Et encore « Non pour que nous soyons approuvés, mais pour que vous fassiez le bien », et encore « Non pour perdre, mais pour édifier ». (2Cor. 13,7, 10) Pourquoi donc appeler Satan au châtiment ? Pour qu’avec la vigueur et la sévérité de la peine, l’humiliation fût plus grande ; ou plutôt les apôtres instruisaient eux-mêmes les infidèles et livraient à Satan ceux qui s’étaient écartés de l’Évangile. Cependant saint Pierre punit lui-même Ananie ? C’est qu’il était encore infidèle, puisqu’il tentait le Saint-Esprit. Afin que les infidèles apprissent qu’ils ne peuvent rester ignorés, les apôtres les ont punis par eux-mêmes ; mais ceux qui étant instruits se sont dévoyés, ils les ont livrés à Satan, pour leur montrer que ce n’était pas à leur propre vertu, mais à la garde des apôtres qu’ils devaient d’être préservés de Satan, et que ceux qui s’emportaient à un orgueil insensé lui étaient livrés. Il en est ainsi des rois qui frappent eux-mêmes leurs ennemis étrangers et livrent aux bourreaux ceux qui sont leurs sujets.