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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/485

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tentation, qui nous ordonne aussi de prendre notre croix et de le suivre. Ce ne sont pas là des ordres contradictoires ; ce sont des ordres qui s’accordent et qui sont en parfaite harmonie. Préparez-vous, équipez-vous comme un vaillant soldat, soyez toujours en armes, toujours sobre, toujours vigilant, toujours attendant l’ennemi ; mais n’allumez pas le flambeau de la guerre : ce ne serait pas d’un soldat, ce serait d’un séditieux. Mais la trompette de la foi vous appelle-t-elle ? marchez aussitôt, ne tenez plus à la vie, marchez avec ardeur au combat, enfoncez-les bataillons ennemis, frappez le démon au visage, élevez un trophée. Mais si la religion ne reçoit aucune atteinte, si nos dogmes spirituels ne sont point attaqués, si l’on ne vous force point à faire ce qui déplaît à Dieu, ne prenez point de peine superflue. Il faut que la vie d’un chrétien soit une vie sanglante. Oui, il doit être toujours prêt à verser le sang, non pas celui d’autrui, mais le sien : quand il s’agit de verser son sang pour le Christ, il faut être prêt à le verser comme de l’eau ; car ce sang qui circule dans nos veines n’est que de l’eau ; il faut se dépouiller de sa chair avec autant de facilité que d’un vêtement. Et c’est ce que nous ferons, si nous ne nous attachons pas aux richesses, si nous ne sommes pas esclaves des beaux édifices, de la volupté et des biens de ce monde. Si ceux qui passent leur vie sous les drapeaux mènent une vie d’abnégation, vont où la guerre les appelle, entrent en campagne et supportent de bon cœur toutes les fatigues, ne devons-nous pas, nous soldats du Christ, trous tenir toujours prêts et équipés, et nous ranger en bataille pour faire la guerre aux vices ?
La persécution n’existe plus aujourd’hui, et à Dieu ne plaise qu’elle revienne ! Mais nous avons à soutenir d’autres guerres, la guerre de l’avarice, la guerre de l’envie, la guerre des autres passions. C’est à cette guerre que Paul fait allusion, en ces termes : « Nous n’avons pas à lutter contre des hommes de chair et de sang ». (Eph. 6,12,14) Cette guerre-là nous menace toujours. C’est pourquoi il veut que nous restions toujours en armes « Soyez donc », dit-il, « toujours armés ». Cette recommandation s’applique même à l’heure présente, et il montre pourquoi il faut toujours être armé. Nous avons une grande guerre à soutenir contre notre langue, contre nos yeux ; cette guerre, repoussons-la. Nous avons une grande guerre à soutenir contre nos passions, c’est pourquoi il s’occupe de l’armure du soldat du Christ. « Restez fermes », dit-il, « ceignez vos reins », et il ajouté : « Avec la ceinture de la vérité ». Pourquoi ? C’est que les passions ne sont qu’illusion et mensonge ; comme dit quelque part David : « Mes reins étaient remplis d’illusions ». (Ps. 37,8) Ce n’est pas la volupté, ce n’est que l’ombre de la volupté. C’est pourquoi, dit-il, ceignez vos reins avec la ceinture de la vérité, c’est-à-dire de la vraie volupté, de la sagesse, de l’honnêteté.
De là ces conseils qu’il nous donne, en voyant combien le péché est déraisonnable, et dans son désir que tous nos membres soient bien munis de toutes parts : « La colère injuste », dit-il, « ne sera jamais innocente aux yeux de Dieu ». (Sir. 1,22) Il veut dire que nous prenions la cuirasse et le bouclier : C’est que la colère est une bête féroce toujours prête à s’élancer. Pour la vaincre, pour la contenir, nous avons besoin de mille fossés, de mille barrières. Voilà pourquoi Dieu a construit avec des os presque aussi durs que la pierre, cette partie de l’édifice humain où la colère cherche à se glisser. Il lui a donné une base solide, il l’a entourée d’un rempart ; il ne fallait pas qu’en rompant et en brisant tous les obstacles, la colère détruisît tout l’édifice animé. C’est un feu, dit-il, c’est une tempête et, sans toutes ces précautions, aucun de nos membres ne pourrait soutenir ses assauts. Les médecins disent aussi que, pour ce motif, le poumon a été placé au-dessous du cœur. Il fallait que le cœur, environné de parties molles, se reposât en rencontrant ce poumon spongieux, et non les parois dures et résistantes de la poitrine sur lesquelles, dans ses bonds précipités, il aurait pu se blesser. Nous avons donc besoin d’une forte cuirasse, pour tenir continuellement en respect la bête féroce. Il nous faut aussi un casque ; c’est sous le casque qu’est le siège du raisonnement d’où dépend notre salut, quand nous agissons bien, et qui fait notre perte, quand nous agissons mal. Voilà pourquoi il dit : « Le casque du salut » ; car le « cerveau est mou de sa nature », et voilà pourquoi il est protégé par une sorte de test appelé crâne. La source de tous nos biens et de tous nos maux c’est d’avoir ou de n’avoir pas la connaissance de ce qui nous est utile ou nuisible. Nos pieds et nos mains aussi ont besoin d’armures ; mais il ne s’agit pas ici des mains et des pieds du corps ; il s’agit des mains et des pieds de l’âme ; les unes doivent s’efforcer de remplir leur tâche, les autres doivent aller où il faut. Armons-nous donc ainsi et nous pourrons vaincre nos ennemis et Ceindre la couronne de gloire par la grâce de Jésus-Christ Notre-Seigneur. A lui, au Père et au Saint-Esprit, gloire, puissance et honneur, maintenant et toujours et dans tous les siècles des siècles ! Ainsi soit-il !

HOMÉLIE VI.


C’EST POUR CELA QUE LE SAINT-ESPRIT DIT : SI VOUS ENTENDEZ AUJOURD’HUI SA VOIX, N’ENDURCISSIEZ POINT VOS CŒURS, COMME AU TEMPS DE MA COLÈRE ET AU JOUR DE LA TENTATION DANS LE DÉSERT, OU VOS PÈRES ME TENTÈRENT, OU ILS VOULURENT ÉPROUVER MA PUISSANCE, ET OU ILS VIRENT LES CHOSES QUE JE FIS PENDANT QUARANTE ANNÉES. AUSSI ME SUIS-JE IRRITÉ CONTRE CETTE GÉNÉRATION, ET J’AI DIT : ILS SE LAISSENT TOUJOURS EMPORTER PAR L’ÉGAREMENT DE LEURS CŒURS, ILS NE CONNAISSENT POINT MES VOIES ;