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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/83

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et de ce côté encore nous devenons ses frères. C’est dire qu’ainsi nous devenons d’autres Jésus-Christ. Ciel ! quelle est donc la dignité des souffrances ? Car, comme par le baptême « nous avons été ensevelis à la ressemblance de sa mort », ici nous devenons vraiment semblables à sa mort. L’apôtre se sert pour le baptême d’un mot bien exact : « À la ressemblance de sa mort », car nous n’avons pas subi alors le trépas véritable et entier ; nous sommes morts seulement au péché, et non pas selon le corps et la chair. Dans les deux textes, il est question de mort ; seulement notre Maître est mort dans son corps, et nous, seulement au péché. Il est mort, lui, dans notre humanité même, dans notre chair qu’il avait adoptée ; pour nous, au contraire, c’est l’homme de péché qui meurt en nous. Saint Paul a donc dû écrire que nous subissons « la ressemblance de sa mort », quand il s’agit de notre baptême ; tandis que ce n’est plus une ressemblance, c’est sa « mort même » que nos souffrances nous font partager ici.

3. Paul, en effet, dans les persécutions qu’il a endurées, n’est pas mort seulement au péché ; mais dans son corps même, il a subi la mort comme son Maître pour arriver enfin, dit-il, « à la résurrection des morts ». Que dites-vous, ô grand apôtre ? Tous les hommes ne doivent-ils pas ressusciter ? N’avez-vous pas dit vous-même que nous ne nous endormirons pas tous, mais que nous serons tous changés ? (1Co. 15,51) Ce n’est pas d’ailleurs la résurrection seule qui attend tous les hommes, c’est aussi l’immortalité, les uns pour la gloire, les autres pour le supplice. Si donc tous arrivent à la résurrection et non pas à la résurrection seulement, mais à l’immortalité, comment, ô Paul, dites-vous comme s’il s’agissait d’obtenir quelque chose d’exceptionnel : « Je veux tâcher enfin d’arriver ? » Je souffre tout, répondez-vous, pour arriver à la résurrection, « mais à celle qui fait sortir d’entre les morts » ; si vous ne mourez d’abord, vous ne ressusciterez pas. Qu’est-ce à dire ? L’apôtre semble avoir en vue une bien haute récompense. Elle était si haute qu’il n’ose se la garantir : « Je veux tâcher enfin », dit-il, j’ai cru en lui, j’ai cru en sa résurrection ; j’ai fait plus, pour lui, je souffre ; et cependant je n’ose me reposer avec une pleine confiance dans l’espérance de la résurrection. De quelle résurrection parle-t-il donc ici ? De celle qui conduit à Jésus-Christ.

Oui, l’apôtre le déclare : je crois en lui, à la puissance de sa résurrection à ma part dans ses souffrances, à ma conformité à sa mort ; et malgré toutes mes convictions, je n’ose avoir pleine confiance. C’est, au reste, ce qu’il écrit ailleurs : « Que celui qui est debout prenne et garde de tomber ». Et : « Je crains qu’après avoir prêché aux autres, je ne devienne moi-même un réprouvé ». (1Cor. 10,12 et 9, 27)

« Ce n’est pas que j’aie atteint jusque-là ni que je sois déjà parfait ; mais je poursuis ma course, pour tâcher d’atteindre au terme où le Seigneur Jésus-Christ m’a destiné en me prenant ». — « Je n’ai pas encore atteint », quoi donc ? Le prix de la course. Ah ! si saint Paul, après tant de souffrances, au milieu même de tourments actuels, subissant déjà la mort, n’était pas encore pleinement confiant ni en pleine sécurité pour sa résurrection glorieuse, que dirons-nous de nous-mêmes, mes frères ? — « Pour tâcher d’atteindre », qu’est-ce à dire ? Rapprochez ici le texte : « Pour tâcher d’arriver à la résurrection d’entre les morts », et concluez qu’il se tient heureux s’il atteint, s’il saisit la résurrection de Jésus-Christ, dussé-je, dit-il, pour l’imiter autant que je pourrai, souffrir autant que lui et me modeler sur lui, comme lui-même a subi mille douleurs, comme il a été souillé de crachats, battu de soufflets et de verges, comme ; il a subi la mort. Voilà la carrière à parcourir ; voilà le chemin par où il vous faut passer pour arriver à sa résurrection à travers tous les combats.

Tel est le sens de ces paroles : « Pour tâcher d’atteindre ». On peut aussi l’entendre comme s’il disait : Pour que je devienne digne d’arriver à cette résurrection si belle, si capable de combler mes vœux ; pour que j’arrive à la résurrection, enfin, de Jésus lui-même. Car si j’ai le cœur de subir tous les combats et tous les travaux, je pourrai aussi gagner sa résurrection et revivre avec gloire. Maintenant je n’en suis pas digne encore, mais je poursuis ma course pour tâcher enfin d’y atteindre. Ma vie n’est encore qu’une lutte perpétuelle ; je suis encore loin du terme, encore loin du prix ; il me faut courir encore, encore le poursuivre.

Remarquez même qu’il ne dit pas : Je cours ; mais : « Je poursuis ». Il a raison. Car celui qui poursuit, vous savez avec quelle ardeur il presse ses rivaux ; il ne regarde personne ; il