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Page:Cicéron - Œuvres complètes, Lefèvre, 1821, tome 28.djvu/345

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Maximes, les Pauls, les Scipions ? qu’apprendront-ils de cette patrie, ornée de leurs trophées et de leurs victoires ? Faudra-t-il leur dire qu’un enfant de dix-sept ans, dont l’aïeul fit le métier de banquier, et le père celui de répondant (l’un jusqu’à la vieillesse, pour qu’on ne pût en douter ; l’autre depuis son enfance, et il était forcé d’en convenir), pille et dévaste la république, exerce un pouvoir absolu, sans aucun mérite personnel, sans avoir ajouté par les armes aucune province à cet empire, sans aucune recommandation de la part de ses ancêtres ; qu’il ne doit sa fortune, et le nom célèbre et odieux dont il est revêtu, qu’à sa beauté déshonorée et à ses infâmes complaisances ; qu’il a rappelé au combat(6) les anciens gladiateurs de Jules, accablés par l’âge et les blessures, et qu’entouré de ces misérables restes des jeux de César, il renverse tout, n’épargne personne, ne vit que pour lui, et semble regarder la république comme une dot ou un héritage ? Les deux Décius apprendront que l’esclavage enchaîne les mêmes citoyens qu’ils ont voulu, en se dévouant à la victoire, faire régner sur tous les peuples. C. Marius apprendra que nous obéissons à un tyran impudique, lui qui ne souffrit pas la licence même parmi ses soldats. Brutus apprendra que ce peuple, que lui d’abord, puis un de ses descendants, ont délivré du despotisme royal, a vu sa liberté vendue au prix de l’infamie. Si ces nouvelles ne leur sont point annoncées par une autre bouche, moi-même j’irai bientôt les en instruire ; car si je ne puis, en restant sur la terre, éviter la vue de ces calamités, je suis résolu à me délivrer à la fois et de la vie et du spectacle de tant de crimes.