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Page:Claudine a l'Ecole.pdf/211

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claudine à l’école

et la chambre voisine donne dans le corridor… Je reconnais là le doigt de la Providence, il n’y a pas à le nier… Tant pis, il arrivera ce qui arrivera, mais je ne veux pas que la Rousse puisse triompher et se dire : « Je l’ai enfermée ! » Je ragrafe ma ceinture, je remets mon chapeau. Je ne vais pas dans la cour, pas si bête, je vais chez les amis de papa, ces X…, hospitaliers et aimables, qui m’accueilleront bien. Ouf ! Que cette commode est lourde ! J’en ai chaud. Le verrou est dur à pousser, il manque d’exercice, et la porte s’ouvre en grinçant, mais elle s’ouvre. La chambre où je pénètre, la bougie haute, est vide, le lit sans draps ; je cours à la porte, la porte bénie qui n’est pas fermée, qui s’ouvre gentiment sur le délicieux corridor… Comme on respire bien, quand on n’est pas sous clef ! Ne nous faisons pas pincer ; personne dans l’escalier, personne dans le bureau de l’hôtel, tout le monde fait des roses. Faites des roses, bonnes gens, faites des roses sans moi !

Dehors, dans la nuit tiède, je ris tout bas ; mais je dois aller chez les X… L’ennui, c’est que je ne connais pas le chemin, surtout la nuit. Bah ! je demanderai. Je remonte d’abord, résolument, le cours de la rivière, puis je me décide, sous un réverbère, à demander « la place du Théâtre, s’il vous plaît ? » à un monsieur qui passe. Il s’arrête, se penche pour me regarder : « Mais, ma belle enfant, permettez-moi de vous y conduire, vous ne sauriez trouver toute seule… » Quelle