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claudine à l’école

loups, sans guère parler. Et, la fringale apaisée, nous demandons tour à tour, toutes les dix minutes, l’heure qu’il est. Mademoiselle essaie vainement de calmer notre énervement en assurant que les concurrentes sont trop nombreuses pour que ces messieurs aient pu lire toutes les compositions avant neuf heures : nous bouillonnons quand même.

On ne sait plus que faire, dans cette cave ! Mlle Sergent ne veut pas nous mener dehors ; je sais bien pourquoi : la garnison est en liberté, à cette heure-ci, et les pantalons rouges, farauds, ne se gênent pas. Déjà, en venant dîner, notre petite bande était escortée de sourires, de claquements de langue et de bruits de baisers jetés ; ces manifestations exaspèrent la Directrice qui fusille de ses regards les audacieux fantassins ; mais il en faudrait plus pour les faire rentrer dans le rang !

Le jour qui décroît, et notre impatience, nous rendent maussades et méchantes ; Anaïs et Marie ont déjà échangé des répliques aigres, avec des attitudes hérissées de poules en bataille ; les deux Jaubert semblent méditer sur les ruines de Carthage, et j’ai repoussé d’un coude pointu la petite Luce qui voulait se faire câliner. Heureusement, Mademoiselle, presque aussi agacée que nous-mêmes, sonne, et demande de la lumière et deux jeux de cartes. Bonne idée !

La clarté des deux becs de gaz nous remonte un peu le moral, et les jeux de cartes nous font sourire.