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claudine à l’école

— Et qu’est-ce que vous avez raconté ?

— Oh ! heureusement je savais un peu, Mademoiselle ; j’ai dit qu’on versait de l’eau sur de la chaux, que les bulles de gaz qui se formaient étaient de l’acide sulfurique.

— Vous avez dit cela ? articule Mademoiselle avec des envies de mordre…

Anaïs se dévore les ongles de joie. Marie foudroyée n’ouvre plus la bouche, et la Directrice nous emmène, raide, rouge, marchant au pas accéléré ; nous trottons derrière comme des petits chiens, et c’est tout juste si nous ne tirons pas la langue sous ce soleil écrasant.

Nous ne faisons plus guère attention à nos concurrentes étrangères qui ne nous regardent pas davantage. La chaleur et l’énervement nous ôtent toute coquetterie, toute animosité. Les élèves de l’école supérieure de Villeneuve, les « vert pomme » comme on les appelle — à cause du ruban vert dont elles sont colletées, cet affreux vert cru dont les pensionnats gardent la spécialité — affectent bien encore des airs prudes et dégoûtés en passant près de nous (pourquoi ? on ne saura jamais) ; mais tout ça se tasse et se calme ; on songe déjà au départ du lendemain matin, on songe avec délices qu’on fera la « gnée »[1] aux camarades recalées, à celles qui n’ont pu se présenter

  1. Faire bisquer.