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Page:Claudine a l'Ecole.pdf/84

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claudine à l’école

est toute prête à partir. Mlle Sergent la tient par la taille et lui parle bas, avec l’air d’insister tendrement. Puis elle embrasse longuement la petite Aimée voilée, qui se laisse faire et se prête, gentiment, et même, s’attarde et se retourne en descendant l’escalier. Je me sauve sans qu’elles m’aperçoivent, mais j’ai, encore une fois, un gros chagrin. Méchante, méchante petite, qui s’est vite détachée de moi, pour donner ses tendresses et ses yeux dorés à celle qui était notre ennemie !… Je ne sais plus que penser… Elle me rejoint dans la classe où je suis restée, figée dans mes songeries.

— Vous venez, Claudine ?

— Oui, Mademoiselle, je suis prête.

Dans la rue je n’ose plus la questionner ; qu’est ce qu’elle me répondrait ? J’aime mieux attendre d’être installée à la maison, et, dehors, lui parler banalement du froid, prédire qu’il va neiger encore, que les leçons de chant du dimanche et du jeudi nous amuseront ;… mais je parle sans conviction et elle sent bien, elle aussi, que tout ce bavardage ne compte pas.

Chez nous, sous la lampe, j’ouvre mes cahiers et je la regarde : elle est aussi jolie que l’autre soir, un peu plus pâle, avec des yeux cernés qui paraissent plus grands :

— Vous êtes fatiguée, on dirait ?

Elle s’embarrasse de toutes mes questions, pourquoi donc ? La voilà qui devient rose, qui regarde