Aller au contenu

Page:Clemenceau - Au soir de la pensée, 1927, Tome 2.djvu/186

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
181
l’évolution

Les néo-lamarckiens, les néo-darwiniens, au nom des conceptions de leurs maîtres, peuvent continuer d’échanger des critiques superficielles ou profondes. Gardons-nous de nous en plaindre. La science ne peut qu’y gagner. Il faut dire, toutefois, que des disciples très distingués, mais n’ayant pas toujours l’illumination des maîtres, sont exposés à se perdre en des chemins si laborieux.

Pour ce qui est de la variation susceptible de produire la transformation proprement dite d’une espèce en une autre, de Vries a pu saisir le phénomène au passage, et Jacques Lœb n’hésite pas « à rapprocher cette découverte des expériences de Rutherford, de Soddy, de Ramsay sur la transformation des éléments chimiques… De Vries a découvert que si on cultive les graines d’une plante nommée œnothera lamarckiana, un petit nombre de ces graines produisent des espèces nouvelles « qui se distinguent de la plante mère par des caractères bien déterminés ». Le fait essentiel est que les graines de ces nouvelles espèces se reproduisent toujours, mais ne reproduisent pas nécessairement la forme primitive. Cette découverte a modifié la conception transformiste en montrant que « des formes nouvelles peuvent se produire brusquement — et non toujours par une série de variations insensibles, comme l’avaient admis Wallace et Darwin[1] ». C’est ce que de Vries a appelé « mutation brusque », Ainsi, un nouveau champ de discussion s’est profitablement offert, mais j’avoue qu’à mes yeux le temps ne fait rien à l’affaire puisqu’il n’est qu’un échelon de notre subjectivité. Il y a des mutations brusques, il y en a d’insensibles. Nous avons pu saisir la mutation : c’est le principal. En résumé, le transformisme ne peut être que l’effet des composantes de l’hérédité conservatrice, et de-l’activité élémentaire d’évolution.

On peut décrire la cellule comme on a décrit l’atome, car elle est quelque chose comme l’atome organique, auquel la membrane protoplasmique, le noyau, le protoplasma, surtout, font, par l’osmose, des conditions d’activité particulière dans une complexité où se réalise la vie de l’organe. J’ai pu noter rapidement les activités de l’atome. Je n’en saurais faire autant pour la cellule, le noyau ou le protoplasma qui m’entraîneraient trop

  1. Jacques Lœb. Le Dynamisme des phénomènes de la vie.