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Page:Colet - Promenade en Hollande.djvu/168

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PROMENADE EN HOLLANDE

l’avons faite ? » Et véritablement le doute leur était permis : l’enfant se développait splendidement et était déjà comme une ébauche ravissante de la beauté parfaite que vous avez vue tantôt ; en revanche, rien de pâle, de courbé, de sec et d’osseux comme le docte couple ! Comment une telle fleur avait-elle pu sortir de ces deux parchemins ? Sans doute le père et la mère créent l’enfant ; mais le lait de la nourrice, l’hygiène, le grand air, les soins, le contact de tous les êtres qui l’approchent, lui donnent une seconde vie et le métamorphosent.

De quelle façon fut élevée cette jeune fille si absolue et si vivace entre ces deux momies ? vous pouvez le deviner. M. et Mme Van Dolfius ne vivaient plus que de la vie intérieure de la science ; tout bruit du dehors leur était importun ; doux, passifs, et entièrement absorbés par leurs travaux, ils laissaient à tout ce qui les entourait une entière liberté ; pourvu qu’on ne touchât point à leurs livres et à leurs manuscrits, surtout aux précieuses et innombrables vitrines qui contenaient leurs collections, ils étaient les maîtres les plus débonnaires du monde ; ils faisaient largesse de leurs revenus, et il n’est pas de fantaisie ruineuse que leur fille n’ait pu satisfaire en grandissant. L’institutrice qu’on lui donna était une personne expérimentée, d’un physique agréable et de manières distinguées, quoiqu’un peu libres. Elle avait fait plusieurs éducations