Page:Collection de précis historiques et mélanges religieux, littéraires et scientifiques, année XII, 1863.djvu/295

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de l’esprit malin. De la sorte, au moment où, dans sa malice, ce serpent se glorifiait avec le plus d’insolence, notre vierge, aussi prudente qu’intrépide, l’abattait d’une main victorieuse et le foulait aux pieds comme un ver de terre. En domptant ainsi sa nature et en ornant son âme de toutes les grâces de l’Esprit-Saint, elle accomplit cette parole du prophète : Le roi sera épris de ta beauté. Autant était étroite la voie qu’elle suivit, autant furent grands les progrès qu’elle fit dans la science des saints, et les longues années de la solitude partagées entre la prière et la pénitence lui permirent de fournir une carrière pleine de mérites.


II


Une nuit que, selon sa coutume, elle se livrait à la prière, les mains élevées au ciel, elle eut la vision suivante : Un jeune homme resplendissant de lumière lui apparut et lui dit : « Quitte cette solitude et retourne dans ta patrie ; car c’est là que ton corps devra être rendu à la terre et que ton âme prendra son essor vers la patrie céleste. » Réfléchissant sur cette vision, elle crut y reconnaître la voix du ciel ; cependant elle se sentait partagée entre deux sentiments opposés : si, d’une part, elle se réjouissait de la dissolution prochaine de son corps, de l’autre, la pensée de devoir abandonner la solitude l’attristait grandement ; elle trouvait que rien n’est aussi efficace que la retraite et le silence pour élever l’âme à une grande pureté et lui conserver sa candeur originelle. Toutefois elle triompha de ses répugnances ; elle dit adieu à sa solitude chérie et prit la route de Constantinople, par où elle devait passer.

Arrivée dans la capitale, son premier soin fut de se rendre à la magnifique église de Sainte-Sophie ou de la Sagesse divine. Quels ne furent point, en ce lieu, ses sentiments et ses actes ? Vous l’auriez vue, tantôt agenouillée dans ce sanctuaire, répandre des torrents de larmes, épancher amoureusement son âme en profonds soupirs et se consumer dans de saintes langueurs ; tantôt, pareille à une laborieuse abeille qui voltige autour des fleurs printanières, visiter, les uns après les autres, tous les lieux saints de cette cité-reine. Elle aimait entre autres à prier dans l’église de la Mère de Dieu, dite des Blaquernes, et là, prosternée devant l’image vénérée de la Vierge Marie, elle répandait son cœur devant sa Mère bien-aimée. « C’est à vous, disait-elle, Souveraine du monde, que j’ai voué ma vie. C’est en vous, ô Vierge, que je mets tout