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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/172

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core paru, Denbigh entra le dernier dans la salle du déjeuner.

Mrs Wilson crut remarquer que Denbigh, avant de saluer la compagnie qui y était rassemblée, jeta un regard scrutateur autour de la chambre, comme s’il y cherchait quelqu’un. Bientôt cependant il reprit son amabilité ordinaire, et, après avoir dit quelques mots sur les plaisirs de la veille, on se mit à table.

En ce moment la porte s’ouvrit avec violence. M. Jarvis se précipita dans la chambre, et, regardant d’un air égaré autour de lui : N’est-elle pas ici ? s’écria-t-il.

— Qui ? lui demanda-t-on de toutes parts.

— Marie… ma fille… mon enfant, dit le marchand, s’efforçant de maîtriser son émotion ; n’est-elle pas venue ici ce matin avec le colonel Egerton ?

Après avoir reçu une réponse négative, il expliqua brièvement la cause de son anxiété. Le colonel était venu de très-bonne heure, et avait envoyé sa femme de chambre avertir sa fille, qui s’était levée immédiatement. Ils étaient sortis ensemble après avoir laissé un billet, disant qu’elle était allée déjeuner avec les miss Moseley, qui venaient de l’y faire engager. Mrs Jarvis laissait tant de liberté à ses filles, qu’on n’eut aucun soupçon jusqu’au moment où un domestique vint dire qu’on avait vu le colonel Egerton partir du village en chaise de poste avec une dame. Le père alors prit l’alarme et partit au même instant pour Benfield-Lodge, où la plus cruelle certitude l’attendait.

Il ne restait maintenant plus de doute sur leur fuite, et les recherches qu’on fit dans la chambre du colonel ne prouvèrent que trop que l’opinion de M. Holt n’était pas erronée.

Quoique chaque cœur compatît à ce que devait souffrir celui de Jane pendant cette triste explication, le regard doux et compatissant d’Émilie s’était seul tourné vers elle à la dérobée ; mais, lorsque toutes les craintes furent confirmées et qu’il ne resta plus qu’à réfléchir sur cet événement inattendu, elle attira toute la sollicitude de ses bons parents.

Jane avait écouté dans le silence de l’indignation le commencement du récit de M. Jarvis ; elle était si sûre de l’amour et de la loyauté d’Egerton, qu’elle n’eut pas le plus léger soupçon jusqu’au moment où l’on vint annoncer que son domestique avait disparu, et que ses effets n’étaient plus dans sa chambre. Cette circonstance, jointe au témoignage de M. Jarvis, ne lui permettait plus le moindre