Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/180

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ter des dépêches importantes en Angleterre, avait préservé Julia d’un malheur cent fois pire que la mort. Un paquebot était en rade pour attendre le noble lord, et bientôt ils s’y embarquèrent ; Dona Lorenza était la veuve d’un sous-officier espagnol qui était mort en combattant sous les ordres de Pendennyss ; l’intérêt qu’il avait pris au mari l’engagea à offrir sa protection à sa femme. Depuis deux ans il l’avait fait entrer dans un couvent de Lisbonne ; et, pensant qu’elle convenait mieux que toute autre, il la choisit pour accompagner Mrs Fitzgerald en Angleterre.

Pendant la traversée qui fut très-longue, le comte apprit toutes les particularités de l’histoire de Julia ; il vit qu’après avoir lu sur la religion des traités longs et abstraits, elle n’en connaissait point les vérités essentielles et les consolations divines ; il employa, pour les faire pénétrer dans son âme, tous les efforts d’une éloquence entraînante et persuasive, et il eut bientôt le plaisir de remarquer le succès de ses soins ; le baume de la religion vint cicatriser les blessures de Julia, et sa sombre tristesse prit graduellement la teinte plus douce de la mélancolie.

En arrivant à Londres, Pendennyss mit Julia sous la protection de sa sœur, en attendant qu’il eût pris des informations sur la province où elle pourrait trouver sa belle-mère ; il apprit bientôt qu’elle était morte sans laisser de proches parents, et Julia se trouva seule dans le monde. Son mari, cependant, avait eu la prudence de faire un testament ; grâce aux soins du comte, l’authenticité en fut bientôt reconnue, et sa veuve entra en possession de sa petite fortune.

C’était en attendant la décision de cette affaire que Mrs Fitzgerald avait résidé quelque temps aux environs de Bath ; dès qu’elle fut terminée, le comte et sa sœur l’installèrent dans la jolie petite maison qu’elle habitait maintenant, et ils étaient venus l’y voir une fois depuis qu’elle y était établie. La délicatesse interdisait au comte de fréquentes visites ; mais il cherchait toujours toutes les occasions de lui être utile. En retournant en Espagne, Pendennyss avait vu le comte d’Alzada, et il avait tâché d’obtenir le pardon de sa fille ; mais le ressentiment du comte était toujours le même, et il fut forcé d’abandonner son généreux projet. Quelque temps après, Julia, apprenant que son père était dangereusement malade, avait prié son protecteur d’intercéder de nouveau auprès de lui ; mais cette tentative avait encore été sans