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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/387

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pour s’habiller, en regrettant d’avoir si peu de caractère et de ne pouvoir rien refuser à son mari.

Dans l’embrasure d’une fenêtre sur laquelle étaient posés de grands vases renfermant des plantes exotiques, lady Marianne jouait avec une rose à peine éclose, et son cousin le duc de Derwent était devant elle, se demandant laquelle était la plus fraîche et la plus jolie.

— Vous avez entendu, lui dit-il, le projet que l’on a fait pendant le déjeuner d’aller voir la chute d’eau des montagnes. Mais je suppose que vous l’avez vue trop souvent pour être du nombre des curieux.

— Pardonnez-moi, répondit Marianne en souriant, j’ai toujours aimé beaucoup cette cascade, et je me fais un vrai plaisir d’être témoin de l’effet qu’elle produira sur Émilie ; je comptais même lui demander une place dans son phaéton.

— Que je serais heureux, s’écria le duc avec vivacité, si lady Marianne voulait en accepter une dans mon tilbury, et me permettre d’être son chevalier !

Marianne consentit à cet arrangement avec un plaisir qu’elle ne chercha point à cacher, et Derwent continua :

— Mais si vous voulez bien me prendre pour chevalier, il est juste que je porte vos couleurs, et sa main se dirigeait vers le bouton de rose. Marianne hésita un moment, jeta les yeux sur le beau point de vue dont on jouissait de la fenêtre, regarda autour de la chambre en demandant où pouvait être son frère ; mais pendant qu’elle cherchait ainsi à dissimuler son trouble, elle rencontra les yeux du duc fixés sur elle avec ardeur ; sa main suppliante était encore étendue vers elle, et elle lui abandonna la rose, dont ses joues éclipsaient en ce moment les plus riches couleurs.

Ils se séparèrent pour se préparer à la promenade, et en revenant de cette petite excursion, le duc paraissait plus gai et plus heureux que jamais ; il ne dit rien qui pût en faire deviner la cause, mais ses yeux brillants de joie tournaient toujours vers sa cousine.

— En vérité, ma chère lady Moseley, dit la douairière en s’asseyant auprès d’elle, après avoir jeté les yeux sur les magnifiques domaines qu’on apercevait de la croisée, et sur le superbe salon où elles se trouvaient, Émilie est vraiment très-bien établie, mais très-bien, mieux même que ma Grace.