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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 18, 1841.djvu/25

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force de coups d’éperons, ils arrivèrent à environ minuit devant la porte principale d’une petite ville entourée de murs, nommée Osma, située à peu de distance des frontières de la province de Burgos, mais qui faisait partie de celle de Soria. Dès que son mulet fut assez près de la porte pour le lui permettre, Nuñez y frappa plusieurs coups assez forts pour annoncer sa présence à ceux qui étaient dans l’intérieur. Il ne fallut pas de grands efforts pour engager les mulets qui étaient à l’arrière-garde à s’arrêter ; mais le jeune domestique prétendu poussa en avant, et il allait prendre sa place parmi les principaux personnages qui se trouvaient près de la porte, quand une grosse pierre, jetée du haut de la muraille, tomba assez près de sa tête pour lui faire sentir combien il avait été près de faire un voyage dans l’autre monde. Le péril qu’il avait couru fit pousser un grand cri à tous ses compagnons, qui vomirent force imprécations contre la main qui avait fait tomber cette pierre. Le jeune homme fut celui qui montra le plus de calme ; et quoique, en se plaignant de ce procédé, sa voix prît un ton d’autorité, elle, n’avait l’accent ni de la colère ni de l’alarme.

— Que veut dire ceci ? s’écria-t-il, est-ce ainsi que vous recevez des voyageurs paisibles, des commerçants qui viennent vous demander l’hospitalité et une nuit de repos ?

— Des voyageurs, des commerçants, grommela une voix sur la muraille, dites plutôt des espions et des agents du roi Henri. — Qui êtes-vous ? répondez sur-le-champ, ou attendez-vous qu’on lancera sur vous quelque chose de plus pointu que des pierres.

— Qui est le gouverneur de cette ville ? demanda le jeune homme, comme s’il eût dédaigné de répondre à une question ; n’est-ce pas le noble comte de Treviño ?

— Oui, señor, répondit le garde d’une voix un peu radoucie. Mais comment une troupe de marchands pourrait-elle connaître Son Excellence ? et qui es-tu, toi qui parles avec autant de fierté que si tu étais un grand d’Espagne ?

— Je suis Ferdinand de Transtamare, — prince d’Aragon, — roi de Sicile. — Va dire à ton maître de se hâter de se rendre ici.

Cette déclaration, qui fut faite avec le ton de hauteur d’un homme accoutumé à une obéissance implicite, produisit un changement marqué dans la situation des affaires. La cavalcade arrêtée