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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 23, 1845.djvu/228

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est le moins jaloux, est le maniement du gouvernail, si ce n’est peut-être de serrer le foc par un gros temps.

— Eh bien ! Moïse, voilà une affaire terminée, et l’Atlantique s’étend de nouveau devant nous ; avec tous les ports de l’Europe offerts à notre choix, et un équipage de quatre hommes, compris le capitaine, pour conduire le bâtiment où nous voudrons.

— Ah ! cette dernière affaire me coupe bras et jambes, Miles. Dire que nos braves matelots nous rejoignaient, si cette remorque infernale n’était pas venue à nous faire faux bond ! Je n’ai jamais éprouvé de désappointement pareil, depuis le jour où je découvris que je n’étais qu’un maudit ermite, malgré la manière dont j’ai généralisé sur l’avantage d’être gouverneur et grand amiral d’une île à moi tout seul.

— Comme il n’y a point de remède, il faut bien en prendre notre parti, mon pauvre ami. La question qui reste à examiner est celle-ci : qu’allons-nous faire ? Si nous nous aventurons dans la Manche, nous rencontrerons cinquante croiseurs prêts à nous arrêter. D’ailleurs les vainqueurs auront bientôt réparé leurs avaries, et ils pourraient nous rejoindre. Le Rapide n’est qu’à moitié désemparé.

— Oui, oui, vous voyez vite et juste, Miles, et je vous admire. Mais il me passe par la tête une idée que je vous soumets ; après cela, faites-en ce que vous voudrez. Au lieu d’aller à l’est de Scilly, si nous passions à l’ouest, pour gagner la mer d’Irlande ? Il faudra plus de temps pour que les nouvelles parviennent de ce côté, et nous pouvons trouver quelque bâtiment américain, ou tout autre, en destination de Liverpool. En mettant les choses au pis, nous pouvons passer entre l’Irlande et l’Écosse, doubler le cap Wrath, et nous diriger sur Hambourg. C’est une longue route, je le sais, qui, de plus, est rude dans certaines saisons de l’année ; mais il y a moyen de s’en tirer en plein été.

— Soit, Marbre, je suis prêt à essayer. Ce serait jouer de malheur, si nous ne trouvions pas quelque caboteur, ou quelque bâtiment pêcheur qui consentît à nous céder un ou deux matelots, moyennant double paie.

— Ah ! pour cela, c’est ce qui ne sera point facile, Miles, à cause de la guerre. La presse doit aller joliment son train, et je crains bien que les Anglais n’aient fait rafle sur toute la côte.

— Allons, Moïse, songez qu’il ne nous faut qu’un ou deux