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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 26, 1846.djvu/155

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mille environ et qui était couverte d’ormes, de hêtres, d’érables et de bouleaux, les plus beaux que j’eusse jamais vus. Le porte-chaîne l’avait choisi parce qu’il était au centre de la propriété de Mooseridge, en même temps qu’il était sans broussailles et qu’il n’y avait point d’eau stagnante dans les environs. Comme tous les autres points de la forêt, la plus riche végétation l’entourait et formait un épais rideau qui l’abritait de tous côtés.

Les constructions du porte-chaîne, toute grossières qu’elles étaient, puisque elles ne se composaient que de bûches assemblées, avaient un aspect pittoresque non dépourvu de charmes. Elles étaient placées irrégulièrement, quoique toujours à proximité de la source. La cuisine et la salle à manger étaient les plus rapprochées de l’eau ; venait ensuite l’habitation des hommes ; tandis que le petit bâtiment que Frank Malbone appelait en riant le Harem était placé sur une petite éminence, un peu à l’écart, mais cependant à moins de cinquante pas du logement d’André. Des planches avaient été taillées pour les planchers et pour les portes de ces huttes ; mais « le Harem » seul avait des fenêtres vitrées. Frank avait même eu pour sa sœur l’attention d’y mettre des contrevents grossiers, mais solides.

Le temps n’était plus où l’on croyait nécessaire de se fortifier contre les attaques. Ces précautions étaient bonnes quand les Français occupaient le Canada, ou bien lorsque ensuite la guerre de la révolution amena de nouveau les sauvages autour des établissements situés sur la frontière, — frontière de la civilisation, sinon du territoire ; — mais avec la guerre avait cessé toute appréhension de ce genre.

Néanmoins ces huttes étaient solides. Les bûches qui les composaient étaient à l’épreuve des balles, et elles n’avaient pas souffert la plus légère altération. C’était une protection suffisante contre les bêtes féroces, seuls ennemis qu’on pût avoir encore à redouter. Il n’y avait aucun sentier couvert qui communiquât de l’une à l’autre ; elles étaient isolées, et n’avaient même autour d’elles aucun enclos qui fût environné de palissades. Il n’y avait même d’autre clairière qu’un espace d’une demi-acre tout au plus sur lequel avaient été coupés les pins qui avaient servi à la construction. Quelques légumes y avaient été plantés, et, malgré