Aller au contenu

Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 27, 1847.djvu/121

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Cela est pourtant vrai, ma chère. Je n’affecterai pas une extrême humilité, et je ne nie pas que les Malbone n’appartinssent à une bonne famille ; mais, mon frère et moi, nous étions dans un temps tellement réduits, que nous étions obligés de travailler dans les bois, tout auprès de cette propriété. Nous n’avions alors aucune prétention supérieure aux vôtres, et, sous bien des rapports, nous étions plus mal partagés. D’ailleurs la fille d’un ministre instruit et bien élevé mérite, même aux yeux du monde, une certaine considération. Vous m’obligerez donc en acceptant mon offre.

— Chère dame je ne sais comment vous refuser, ni comment recevoir un si riche présent. Vous me permettrez d’abord de consulter mon père ?

— C’est trop juste, ma chère, répondit mon excellente parente en remettant la montre dans sa poche. Heureusement M. Warren dîne avec nous, et nous arrangerons l’affaire avant de nous mettre à table.

Cela mit fin à la discussion dont nous avions été tous témoins. Pour mon oncle et moi, il est à peine nécessaire de dire combien nous fûmes charmés de cette petite scène. D’un côté, le bienveillant désir d’obliger, de l’autre le scrupule de recevoir cette double lutte de délicatesse nous ravissait. Les trois jeunes personnes respectaient trop les sentiments de Mary pour intervenir, quoique Patt se contînt difficilement. Quant à Tom Miller et à Kitty, ils s’étonnaient sans doute que la fille de M. Warren fut assez simple pour hésiter d’accepter une montre qui valait cent dollars. C’était encore un point qu’ils ne pouvaient comprendre.

— Vous parliez de dîner, reprit ma grand’mère en regardant mon oncle ; si vous et votre compagnon vouliez nous suivre à la maison, je vous paierais le prix de la montre, et vous auriez à dîner par-dessus le marché.

Nous fûmes enchantés de cette offre, que nous acceptâmes en faisant force révérences et en exprimant nos remercîments. Après que la voiture fut partie, nous restâmes un instant pour prendre congé de Tom Miller.

— Quand vous aurez terminé dans la grande maison, dit ce brave homme, faites encore un tour par ici ; je voudrais que ma femme et Kitty jetassent un coup d’œil sur toutes vos belles choses, avant que vous les emportiez au village.