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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 27, 1847.djvu/293

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exprimé, aussi bien que de l’air de résolution qui l’accompagnait. Mary elle-même ne put s’empêcher de rougir, mais elle n’en persista pas moins dans son projet.

— Mais de quelle utilité pouvons-nous être à Hughes, ma chère, répondit Patt, même en supposant qu’il y eût quelque danger ? Il vaut mieux que nous regagnions promptement la maison pour envoyer ici de l’aide, plutôt que d’y rester immobiles et sans utilité.

Profitant aussitôt de cet avertissement, mesdemoiselles Colebrooke et Marston, qui étaient déjà en avant, prirent leur course, sans doute pour mettre à exécution le projet de ma sœur ; mais Mary Warren resta ferme, et Patt ne voulut pas abandonner son amie, quelle que fût sa disposition à me traiter avec moins de cérémonie.

— Il est vrai, reprit la première, que nous ne serions pas capables d’assister M. Littlepage si l’on avait recours à la violence mais la violence est peut-être ce qui est le moins à craindre. Ces misérables gens respectent si peu la vérité, et ils sont trois contre un si votre frère reste seul, qu’il nous vaut mieux rester et entendre ce qui sera dit, afin que nous puissions témoigner des faits, si ces hommes voulaient les travestir, comme il arrive trop souvent.

Je fus frappé de la prudence et de la sagacité de cette réflexion, et Patt alors s’approcha de la barrière sur laquelle je m’étais assis avec un air aussi calme et aussi résolu que Mary Warren. En ce moment les trois envoyés se trouvaient près de nous ; deux d’entre eux étaient de mes tenanciers ; ils se nommaient Bunce et Mowatt. Je les connaissais fort peu, mais c’étaient d’ardents anti-rentistes. Le troisième m’était complétement inconnu ; c’était un démagogue ambulant qui avait été l’un des meneurs les plus actifs du dernier meeting, et se servait des deux autres comme d’aveugles instruments. Ils s’avancèrent tous trois vers moi avec un air de grande importance. Bunce prit le premier la parole.

— Monsieur Littlepage, dit-il, il y a eu ce matin un meeting public dans lequel ont été adoptées diverses motions ; nous avons été délégués pour vous en présenter une copie, et notre mission est accomplie en vous remettant ce papier.

— Et qui vous dit, répondis-je, que je juge à propos de le recevoir ?

— Je ne pense pas qu’aucun homme, dans un pays libre, se refuse à recevoir une série de motions adoptées dans un meeting de ses concitoyens.