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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/73

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Marc n’avait pas d’objection à faire, et les cages furent ouvertes. Chaque poule fut successivement portée à la lisse de couronnement et lancée en l’air, d’où elle allait s’abattre sur le Récif qui n’était qu’à deux cents pieds de distance. C’était un grand bonheur pour elles que cette délivrance. À la grande surprise de Marc, elles ne furent pas plus tôt dans l’île qu’elles se mirent à becqueter avidement, comme si elles eussent été au milieu de la basse-cour la mieux fournie. Marc n’y pouvait rien comprendre, mais son étonnement redoubla encore quand, détournant les yeux sur le pont, il y vit les canards livrés à la même occupation. Il se baissa pour regarder quel genre de nourriture ils avaient pu trouver ; le pont était couvert d’un grand nombre de petites particules mucilagineuses, qui étaient sans doute tombées avec la pluie, et dont tous les oiseaux, et même les porcs, se montraient avides. C’était donc une sorte de manne tombée du ciel qui allait faire le bonheur de ces pauvres bêtes, du moins pour quelques heures.

Bob prit les canards et les jeta par-dessus bord et en voyant leur joie à barboter dans l’eau, ceux qui les avaient mis en liberté ne purent s’empêcher de la partager jusqu’à un certain point.

Il ne restait plus à bord d’autre être vivant que la chèvre, et quoiqu’il ne fût pas probable qu’elle leur fût jamais d’une grande utilité et qu’il ne leur fût pas facile de pourvoir à sa subsistance, il répugnait à Marc de s’en défaire. La Providence ne les avait-elle pas conduits ensemble jusque-là ? et puis ne serait-ce pas un joli tableau de la voir courir de roche en roche ? elle animerait un peu le paysage, qui en avait grand besoin. D’un autre côté ce serait un danger de plus pour les plantations, si les légumes venaient à pousser. Quoi qu’il en pût être, un répit lui fut accordé, et il fut décidé qu’elle serait conduite dans l’île, et qu’on attendrait encore quinze jours avant de prononcer définitivement sur son sort.

En débarquant, Marc trouva les moindres cavités pleines d’eau. Il y en avait assez pour remplir toutes les futailles du