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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 4, 1839.djvu/232

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augure favorable du soin que vous avez pris de la conserver.

Cécile baissa la tête, cacha dans ses mains son visage couvert de la plus vive rougeur, et cédant à une émotion véritablement féminine, elle versa un torrent de larmes. Nous pensons qu’il est inutile de rapporter ici les discours pleins d’une douce affection par lesquels le jeune major réussit à sécher ses pleurs, à bannir la confusion qu’elle éprouvait, et enfin à faire lever sur lui des yeux qui exprimaient toute la confiance qu’il pouvait désirer.

La lettre de Lionel était trop claire pour que Cécile eût quelque chose de nouveau à apprendre, et elle l’avait relue trop souvent pour en avoir oublié un seul mot. D’ailleurs Cécile l’avait vu trop souvent et avec trop d’inquiétude, pendant sa longue maladie, pour avoir recours à aucune de ces petites coquetteries qui s’emploient si souvent dans de pareilles scènes. Elle lui dit tout ce que pouvait dire en semblable occasion une jeune fille pleine de modestie, d’affection et de générosité, et il est certain que, quoique Lionel se trouvât déjà bien quand il avait quitté son lit, le peu qu’elle lui dit fit qu’il se trouva encore bien mieux après cette courte conversation.

— Et vous reçûtes ma lettre le lendemain de la bataille ? dit Lionel en la regardant tendrement, tandis qu’elle s’asseyait sur une chaise près de lui.

— Oui ; vous aviez donné ordre qu’on ne me la remit que si vous n’existiez plus ; mais pendant plus d’un mois nous vous avons tous compté au nombre des morts. Ah ! quel mois cruel nous avons eu à passer !

— Qu’il n’en soit plus question, ma chère Cécile ; grâce à Dieu, je puis maintenant espérer des années de bonheur et de santé.

— Oui, grâce à Dieu ! répéta Cécile, les larmes lui venant encore aux yeux ; je ne voudrais pas avoir à passer encore un pareil mois, pour tout ce que ce monde peut offrir.

— Ma chère Cécile, s’écria Lionel, je ne puis payer l’intérêt que vous avez pris à moi et les souffrances que je vous ai occasionnées, qu’en protégeant le reste de votre vie comme le ferait votre père s’il existait encore.

Cécile lui répondit avec l’air de la plus vive confiance :

— Vous le ferez, Lincoln, je sais que vous le ferez ; vous me l’avez promis, et je serais indigne de vous si je doutais de votre promesse.