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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 4, 1839.djvu/338

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heureux jeune homme dans sa chambre, et lui faire donner les secours dont il doit avoir besoin ?

— Cela peut se faire sur-le-champ ou quand nous l’aurons interrogé, répondit Polwarth avec un air de froideur et d’indifférence qui fit que Cécile le regarda avec surprise. S’apercevant de l’impression défavorable que son apathie produisait sur elle, le capitaine se tourna nonchalamment vers deux hommes qui étaient encore à la porte, d’où ils avaient vu tout ce qui venait de se passer.

— Shearflint, Meriton, approchez, et emportez ce drôle dans l’autre chambre.

Cet ordre ne plaisait nullement à chacun des deux domestiques. Meriton murmura à demi-voix, et il était sur le point de désobéir plutôt que de se charger d’un fardeau si dégoûtant. Mais quand Cécile eut ajouté ses prières aux ordres de Polwarth, il n’hésita plus à accomplir ce devoir désagréable, et Job fut reporté sur son grabat dans la petite chambre d’une tourelle, d’où les soldats l’avaient tiré, une heure auparavant, pour le tourmenter plus à leur aise dans le grand appartement.

Quand Abigaïl avait cessé de craindre que les soldats se portassent à quelque acte de violence contre son fils, elle s’était jetée sur le tas de vieilles cordes dont une partie avait servi à entretenir le feu, et elle y était restée dans une sorte d’inertie et de stupeur, pendant qu’en transportait son fils dans sa chambre ; mais voyant alors que Job n’était entouré que de personnes qui, loin de vouloir lui nuire, ne cherchaient qu’à lui être utiles, elle les suivit dans la petite chambre, y porta une chandelle qu’elle alluma, et observa avec attention tout ce qui se passait.

Polwarth semblait penser qu’on en avait fait bien assez pour Job, et il restait debout d’un air un peu sombre, paraissant attendre le bon plaisir de Cécile ; elle avait dirigé le transport du malade avec ce soin attentif qui n’appartient qu’à une femme, et quand il fut effectué, elle ordonna aux domestiques de se retirer dans l’autre pièce et d’y attendre ses ordres. Quand Abigaïl vint se placer en silence près du lit de son fils, il ne restait donc, avec elle et le malade, que Cécile, Polwarth et l’inconnu qui paraissait avoir conduit Cécile dans le magasin. La faible clarté de la chandelle qui brûlait ne servait qu’à faire mieux apercevoir la misère de cet appartement.