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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/114

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il resta immobile pendant tout le temps que dura l’office, et parut y donner une profonde attention. Natty Bumppo s’arrêta près de la cheminée, s’assit sur un tronc d’arbre dont, l’autre bout alimentait le feu, et, son fusil entre ses jambes, il resta absorbé dans ses réflexions qui ne semblaient pas d’une nature très-agréable. Le jeune homme prit la première place qu’il trouva sur les bancs.

Dès qu’ils furent assis et que le silence se fut rétabli, M. Grant se leva et commença le service par la déclaration sublime du prophète hébreu : — Le Seigneur est dans son saint temple ; que toute la terre soit en silence devant lui.

L’exemple de M. Jones n’était pas nécessaire pour apprendre à l’auditoire qu’il devait se lever en ce moment ; l’air solennel du ministre produisit cet effet comme par magie. Après une courte pause, M. Grant commença l’exhortation pathétique qui précède la prière ; mais pendant qu’il la prononçait, quelque nouvelle idée s’étant présentée à l’imagination de M. Jones, il se leva tout à coup, quitta sa place sans bruit, et sortit de la salle sur la pointe des pieds.

Le ministre, tout occupé des fonctions qu’il remplissait, ne s’aperçut pas de cette disparition. Il commença les prières, mais quand il arriva au premier endroit qui exigeait une réponse, il n’avait plus de clerc pour la faire. Une pause d’un instant s’ensuivit, et Élisabeth commençait à sentir péniblement combien cette situation devait être désagréable pour M. Grant, quand la voix douce d’une femme prononça avec timidité la réponse attendue. Ses yeux, guidés par le son, aperçurent alors une jeune étrangère, car elle l’était du moins pour elle, dans l’attitude de la plus humble dévotion, et les yeux fixés sur son livre. Ses vêtements n’étaient ni riches ni à la mode, mais ils étaient propres, et paraissaient élégants parce qu’ils lui aillaient à ravir. Son teint pâle et son air de douceur excitaient un intérêt qu’augmentait encore l’expression mélancolique de ses traits. Une seconde réponse étant devenue nécessaire, la jeune inconnue la fit encore ; mais une voix non moins harmonieuse quoique plus mâle se joignit à la sienne, et miss Temple reconnut aussitôt celle du jeune chasseur. Elle chercha alors à vaincre sa timidité, et à la troisième réponse, sa voix se fit entendre avec les deux autres.

Pendant tout ce temps, Benjamin s’évertuait à feuilleter son livre de prières, afin de pouvoir remplir les fonctions du clerc