Aller au contenu

Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/178

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Elle fut interrompue par la même apparition brillante, qui, la veille, avait mis fin à un tumulte presque aussi formidable en se montrant sur la même hauteur où on l’apercevait alors.

— Au nom de celui qui commande à tous, je vous conjure de vous arrêter, — et vous qui voulez courir un danger si imminent, — et vous qui êtes assez téméraires pour vouloir ôter à un de vos semblables ce que vous ne pouvez lui rendre, dit une voix douce et suppliante, avec un léger accent étranger, qui attira sur-le-champ tous les yeux de ce côté.

— Inez ! chère Inez ! s’écria l’officier ; vous revois-je donc enfin ! maintenant, vous serez à moi, quand un million d’esprits infernaux défendraient ce rocher. — En avant, brave Paul, et faites moi place à votre côté !

L’apparition soudaine, sur le haut de la montagne, de la femme qui venait de sortir de la tente, avait frappé la garnison du rocher d’une stupeur momentanée dont il aurait été possible de profiter. Mais, à la voix de Middleton, Phœbé, surprise et tressaillant, fit feu sur cette femme inconnue, ne sachant trop si elle tirait sur une mortelle ou sur un être appartenant à un autre monde. Hélène poussa un cri d’horreur, et courut à la hâte pour rejoindre sous la tente son amie alarmée, peut-être blessée.

Pendant ce moment d’une diversion dangereuse, le bruit d’une attaque sérieuse se faisait entendre au bas du rocher. Paul, profitant du trouble qui régnait sur le plateau, avait changé sa position de manière à faire place à Middleton ; le naturaliste l’avait suivi, car la terreur que lui avait causée le bruit du coup de fusil l’avait porté, comme par instinct, à chercher un abri sous le rocher. Le Trappeur ne changea pas de place ; il paraissait impassible, mais il observait avec attention tout ce qui se passait. Quoiqu’il ne prît aucune part active aux hostilités, le vieillard n’était pourtant pas inutile aux assaillants. Favorisé par sa position, il pouvait les informer de tous les mouvements de ceux qui conspiraient contre leur vie, et leur indiquer le moment où ils pouvaient avancer.

Cependant les filles d’Esther prouvaient qu’elles avaient leur part de l’esprit de leur redoutable mère. Dès qu’elles furent délivrées de la présence d’Hélène et de sa compagne inconnue, elles donnèrent toute leur attention aux ennemis plus mâles et certainement plus dangereux, qui étaient alors complètement établis entre les pointes du rocher qui hérissaient la forteresse. Les som-