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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/181

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encore été si opiniâtre ; les guerriers des deux partis n’avaient peut-être pas encore couru d’aussi grands dangers personnels. Après de longs et pénibles efforts, les planteurs l’emportèrent, et les sauvages eurent recours à de nouveaux expédients, ne voulant point abandonner leurs cruels desseins.

Pendant les premiers moments qui précédèrent leur entrée dans la maison, et afin de recueillir les fruits de la victoire lorsque la garnison serait réduite, les vainqueurs avaient emporté une partie de l’ameublement sur le penchant de la montagne. Entre autres objets se trouvaient six ou sept lits qui avaient été arrachés des chambres à coucher. On les apporta sur le théâtre de l’attaque comme de puissants auxiliaires ; ils furent jetés l’un après l’autre sur le foyer mal éteint, et bientôt ils répandirent autour d’eux des nuages de fumée. Dans ce moment d’un danger croissant, un cri plus effrayant encore retentit dans la forteresse : le puits était tari ! Les baquets remontèrent aussi vides qu’ils étaient descendus, et furent jetés de côté comme inutiles. Les sauvages semblèrent comprendre ce nouvel avantage, car ils profitèrent du moment de confusion qui eut lieu parmi les assiégés, pour fournir au feu de nouveaux aliments. Les flammes s’élevèrent avec rapidité, et en moins d’une minute elles étaient devenues trop violentes pour être éteintes ; on les vit bientôt se frayer un passage à travers le plafond. L’élément subtil glissa d’un point à un autre, et finit par gagner les côtés extérieurs de la forteresse elle-même.

Les sauvages se virent assurés de la victoire ; des cris et des hurlements proclamèrent leur joie féroce. Cependant il y avait quelque chose de sinistre dans le silence avec lequel les victimes attendaient leur sort. Tout l’extérieur du bâtiment était déjà enveloppé par les flammes, et cependant on ne s’apprêtait point fi une nouvelle résistance, et aucune voix ne s’élevait pour demander merci. Ce calme effrayant et surnaturel se communiqua peu à peu aux assiégeants. Les cris de triomphe cessèrent, et le pétillement des flammes et la chute des poutres dans les bâtiments voisins troublaient seuls cet affreux silence. Enfin une voix se fit entendre dans la forteresse ; ses accents étaient solennels, ils semblaient implorer. Les cruels Indiens qui entouraient la masse enflammée s’avancèrent pour écouter ; car, grâce à la finesse de leur ouïe, ils avaient entendu le premier son : c’était Mark Heathcote invoquant Dieu par une prière fervente, mais calme : et bien qu’elle