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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/215

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la voix, dont le son n’en était que plus touchant en passant par les lèvres d’un homme dont les mouvements étaient si fermes et les membres si vigoureux ; comment Abondance a-t-elle supporté cette bénédiction du ciel ?

— Très-bravement, répondit le docteur. Retourne chez toi, sergent Ring, et rends grâces à Dieu de ce qu’il y a ici quelqu’un pour prendre soin de tes intérêts pendant ton absence. Celui qui a reçu du ciel le don de sept enfants en cinq ans ne doit pas craindre de se trouver jamais dans la pauvreté ni dans la dépendance, dans un pays comme celui-ci. Sept fermes ajoutées à la jolie étendue de terre que tu cultives déjà sur cette montagne, feront de toi un patriarche dans tes vieux jours, et propageront le nom de Ring dans quelques centaines d’années, quand ces colonies seront populeuses et puissantes, et je le dis hardiment, sans m’inquiéter qu’on m’accuse de fanfaronnade, quand elles se trouveront de niveau avec quelques-uns de vos fameux royaumes d’Europe, si vantés par ceux qui les habitent ; oui, et peut-être égales à la puissante souveraineté du Portugal même. J’ai porté au nombre sept celui des fermes futures de ta famille, car l’allusion que l’enseigne vient de faire aux dispositions pour l’art de guérir qu’on prétend naturelles à un septième fils, ne doit être regardée que comme une plaisanterie ; ce n’est qu’une illusion de l’imagination, un conte de vieille femme ; et cela serait particulièrement inutile ici, puisque toutes les places de cette nature y sont déjà remplies en proportion raisonnable avec les besoins. Va donc retrouver ta femme, sergent, et dis-lui de se réjouir, car elle a rendu service à elle-même, à son mari et à son pays ; mais qu’elle ne s’occupe pas d’idées qui sont au-dessus de sa compréhension.

Le brave fermier à qui la Providence venait de faire ce riche présent ôta son chapeau, et, le plaçant devant ses yeux, offrit silencieusement ses actions de grâces au ciel. Remettant alors son prisonnier sous la garde de son officier supérieur, il se dirigea vers son habitation écartée en traversant les champs d’un pas lourd, mais le cœur allégé.

Pendant ce temps Dudley et son compagnon examinaient avec une attention plus particulière l’objet silencieux et presque immobile de leur curiosité. Quoiqu’il parût être de moyen âge, ses yeux étaient sans expression ; il avait l’air timide et incertain, la tournure gauche et même servile. Sous tous ces rapports il était bien