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Page:Corancez - De J. J. Rousseau, 1798.djvu/65

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de la maison, ſoit avec les habitans du lieu. Mon beau-père me rapporta avoir appris que le jour même de ſa mort, Rouſſeau ne fut point au château le matin comme à ſon ordinaire, pour donner au jeune Girardin, encore enfant, la leçon qu’il avoit coutume de lui donner ; qu’il avoit été herboriſer, qu’il avoit rapporté des plantes, qu’il les avoit préparées & infuſées dans la taſſe de café qu’il avoit priſe.

Madame Rouſſeau me raconta qu’il conſerva ſa tête juſqu’au dernier moment. Il fit ouvrir ſa fenêtre, le temps étoit beau, & jetant les yeux ſur les jardins, il proféra des paroles qui prouvoient la ſituation de ſon ame calme & pure comme l’air qu’il reſpiroit, ſe jetant, avec confiance, dans le ſein de l’éternité. J’obſerve que ce moment a été deſſiné & gravé avec les paroles qu’il a proférées.

Madame Girardin, de ſon côté, me raconta, qu’effrayée de la ſituation de Rouſſeau, elle ſe présenta chez lui, & y entra. Que venez-vous faire ici, lui dit Rouſſeau, votre ſenſibilité doit-elle être à l’épreuve d’une ſcène pareille, & de la cataſtrophe qui doit la terminer ? Il la conjura de le laisser ſeul, & de ſe retirer. Elle ſortit en effet. À peine