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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/111

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Ne me la retiens plus, c’est l’unique faveur
1680Dont je te puis encore prier avec honneur.

CÉSAR.

Il est juste, et César est tout prêt de vous rendre
Ce reste où vous avez tant de droit de prétendre ;
Mais il est juste aussi qu’après tant de sanglots
À ses mânes errants nous rendions le repos,
1685Qu’un bûcher allumé par ma main et la vôtre
Le venge pleinement de la honte de l’autre,
Que son ombre s’apaise en voyant notre ennui,
Et qu’une urne plus digne et de vous et de lui,
Après la flamme éteinte et les pompes finies,
1690Renferme avec éclat ses cendres réunies.
De cette même main dont il fut combattu,
Il verra des autels dressés à sa vertu ;
Il recevra des vœux, de l’encens, des victimes,
Sans recevoir par là d’honneurs que légitimes[1] :
1695Pour ces justes devoirs je ne veux que demain ;
Ne me refusez pas ce bonheur souverain.
Faites un peu de force à votre impatience ;
Vous êtes libre après : partez en diligence ;
Portez à notre Rome un si digne trésor ;
Portez…

CORNÉLIE.

1700Portez…Non pas, César, non pas à Rome encore :
Il faut que ta défaite et que tes funérailles
À cette cendre aimée en ouvrent les murailles ;
Et quoiqu’elle la tienne aussi chère que moi,
Elle n’y doit rentrer qu’en triomphant de toi.
1705Je la porte en Afrique ; et c’est là que j’espère
Que les fils de Pompée, et Caton, et mon père,

  1. Var. Et ne recevra point d’honneurs illégitimes :
    Pour ces pieux devoirs je ne veux que demain. (1644-56)