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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/169

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255Moi qui depuis un mois suis ici de retour[1].
Il est vrai que je sors fort peu souvent de jour :
De nuit, incognito, je rends quelques visites ;
Ainsi…

CLITON, à Dorante, à l’oreille.

Ainsi…Vous ne savez, Monsieur, ce que vous dites.

DORANTE.

Tais-toi ; si jamais plus tu me viens avertir…

CLITON.

260J’enrage de me taire et d’entendre mentir !

PHILISTE, à Alcippe, tout bas[2].

Voyez qu’heureusement dedans cette rencontre
Votre rival lui-même à vous-même se montre.

DORANTE, revenant à eux.

Comme à mes chers amis je vous veux tout conter.
J’avois pris cinq bateaux pour mieux tout ajuster[3] ;
265Les quatre contenoient quatre chœurs de musique
Capables de charmer le plus mélancolique ;
Au premier, violons ; en l’autre, luths et voix ;
Des flûtes, au troisième ; au dernier, des hautbois,
Qui tour à tour dans l’air poussoient des harmonies
270Dont on pouvoit nommer les douceurs infinies.
Le cinquième étoit grand, tapissé tout exprès
De rameaux enlacés pour conserver le frais,
Dont chaque extrémité portoit un doux mélange
De bouquets de jasmin, de grenade et d’orange.
275Je fis de ce bateau la salle du festin :
Là je menai l’objet qui fait seul mon destin ;
De cinq autres beautés la sienne fut suivie,

  1. Var. Depuis un mois et plus on me voit de retour ;
    Mais, pour certain sujet, je sors fort peu de jour :
    La nuit, incognito, je rends quelques visites. (1644-56)
  2. Les mots tout bas manquent dans les deux éditions de 1644.
  3. Var. De cinq bateaux qu’exprès j’avois fait apprêter. (1644-56)