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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/185

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Sa vue accroît l’ardeur dont je me sens brûler :
Mais ce n’est pas ici qu’il faut le quereller[1].


Scène V.

GÉRONTE, DORANTE, CLITON.
GÉRONTE.

Dorante, arrêtons-nous ; le trop de promenade
550Me mettroit hors d’haleine, et me feroit malade.
Que l’ordre est rare et beau de ces grands bâtiments !

DORANTE.

Paris semble à mes yeux un pays de romans.
J’y croyois ce matin voir une île enchantée[2] :
Je la laissai déserte, et la trouve habitée ;
555Quelque Amphion nouveau, sans l’aide des maçons,
En superbes palais a changé ses buissons.

GÉRONTE.

Paris voit tous les jours de ces métamorphoses :
Dans tout le Pré-aux-Clercs tu verras mêmes choses[3] ;
Et l’univers entier ne peut rien voir d’égal
560Aux superbes dehors du palais Cardinal[4].
Toute une ville entière, avec pompe bâtie,

  1. Var. Mais ce n’est pas ici qu’il le faut quereller. (1644-56)
  2. Var. Je croyois ce matin voir une île enchantée, (1648-56)
  3. Var. Dedans le Pré-aux-Clercs tu verras mêmes choses. (1644-56)
  4. Var. À ce que tu verras vers le Palais-Royal (a). (1644)

    (a) Le cardinal de Richelieu fit bâtir ce palais par Jacques le Mercier. Les fondements en furent jetés en 1629 sur les ruines des hôtels de Mercœur, de Rambouillet, et de quelques maisons voisines. Il ne fut achevé qu’en 1636. On le nommait d’abord hôtel de Richelieu, mais son propriétaire fit inscrire en lettres d’or sur un marbre au-dessus de la grande porte : Palais Cardinal. Cette inscription fut critiquée, notamment par Balzac (voyez le Lexique). Elle fut toutefois conservée jusqu’au moment où, Louis XIV ayant quitté le Louvre pour habiter le palais Cardinal, que Richelieu lui avait légué, le marquis de Fourille, grand maréchal des logis de la maison du Roi, persuada à la Régente