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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/319

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Et tout autre que lui, dans cette comédie,
N’en fera jamais voir qu’une fausse copie.
Pour Clarice et Lucrèce, elles en ont quelque air ;
290Philiste avec Alcippe y vient vous accorder ;
Votre feu père même est joué sous le masque.

DORANTE.

Cette pièce doit être et plaisante et fantasque.
Mais son nom ?

CLITON.

Mais son nom ?Votre nom de guerre, le Menteur.

DORANTE.

Les vers en sont-ils bons ? fait-on cas de l’auteur ?

CLITON.

295La pièce a réussi, quoique faible de style,
Et d’un nouveau proverbe elle enrichit la ville ;
De sorte qu’aujourd’hui presque en tous les quartiers
On dit, quand quelqu’un ment, qu’il revient de Poitiers.
Et pour moi, c’est bien pis, je n’ose plus paroître.
300Ce maraud de farceur m’a fait si bien connoître,
Que les petits enfants, sitôt qu’on m’aperçoit,
Me courent dans la rue et me montrent au doigt ;
Et chacun rit de voir les courtauds de boutique,
Grossissant à l’envi leur chienne de musique,
305Se rompre le gosier, dans cette belle humeur,
À crier après moi : « Le valet du Menteur ! »
Vous en riez vous-même !

DORANTE.

Vous en riez vous-même !Il faut bien que j’en rie[1].

CLITON.

Je n’y trouve que rire, et cela vous décrie,
Mais si bien, qu’à présent, voulant vous marier,

  1. Var. Vous en riez aussi ! DOR. Veux-tu point que j’en rie ? (1645-56)