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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/366

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MÉLISSE.

Quel bruit et quel éclat n’eût point fait son courroux !

LYSE.

1200Il eût été peut-être aussi honteux que vous.
Un homme un peu content et qui s’en fait accroire,
Se voyant méprisé, rabat bien de sa gloire,
Et surpris qu’il en est en telle occasion,
Toute sa vanité tourne en confusion.
1205Quand il a de l’esprit, il sait rendre le change ;
Loin de s’en émouvoir, en raillant il se venge,
Affecte des mépris, comme pour reprocher
Que la perte qu’il fait ne vaut pas s’en fâcher ;
Tant qu’il peut, il témoigne une âme indifférente.
1210Quoi qu’il en soit enfin, vous avez vu Dorante,
Et fort adroitement je vous ai mise en jeu.

MÉLISSE.

Et fort adroitement tu m’as fait voir son feu.

LYSE.

Eh bien ! mais que vous semble encore du personnage ?
Vous en ai-je trop dit ?

MÉLISSE.

Vous en ai-je trop dit ?J’en ai vu davantage.

LYSE.

1215Avez-vous du regret d’avoir trop hasardé ?

MÉLISSE.

Je n’ai qu’un déplaisir, d’avoir si peu tardé.

LYSE.

Vous l’aimez ?

MÉLISSE.

Vous l’aimez ?Je l’adore.

LYSE.

Vous l’aimez ?Je l’adore.Et croyez qu’il vous aime ?

MÉLISSE.

Qu’il m’aime, et d’une amour, comme la mienne, extrême.