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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/421

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avons cru devoir reproduire cette distribution de rôles parce qu’il n’est pas probable que Mouhy l’ait inventée, mais elle doit être postérieure d’une trentaine d’années à l’époque où parut Rodogune.

Dans une Mazarinade de 1649, intitulée Lettre de Bellerose à l’abbé de la Rivière[1], signée Belleroze, comédien d’honneur et datée de l’hôtel de Bourgogne, le 24 mars, on trouve un passage relatif à la Bellerose, où on lit ce qui suit : « Cette Rodogune, cette impératrice de nos jeux se voit dans un état bien contraire à sa pompe théâtrale. Elle est réduite, il y a déjà assez longtemps, à ne se plus mirer que dans une losange de vitre cassée, ou dans un seau d’eau claire, parce qu’il a été nécessaire qu’elle ait vendu son miroir pour avoir du pain. » Voilà enfin un témoignage contemporain, ou peu s’en faut, qui bien certainement se rapporte à la Rodogune de Corneille, car en 1649 celle de Gilbert devait déjà être oubliée. Il faut nous en tenir à ce renseignement, tout incomplet qu’il est, et compter pour rien les assertions sans preuves des historiens du théâtre.

La Rodogune est du nombre des pièces que Louis XIV fit représenter à Versailles en octobre 1676.

On voit Sertorius, Œdipe, Rodogune,
Rétablis par ton choix dans toute leur fortune,

dit Corneille dans le touchant remercîment qu’il adresse Au Roi en cette occasion.

L’admirable rôle de Cléopatre a été assez souvent choisi par des débutantes : nous pouvons mentionner, d’après Lemazurier, Mlle Aubert, le 13 juin 1712[2] ; Mlle Lamotte, en octobre 1722[3] ; Mlle Balicourt, le 29 novembre 1727[4]. Ces débuts de jeunes actrices dans un rôle de mère donnaient lieu parfois à des scènes fort plaisantes. On a surtout gardé le souvenir du dernier dont nous venons de parler. Quand

  1. Voyez ci-dessus, p. 5 et 6.
  2. Tome II, p. 9.
  3. Tome II, p. 275.
  4. Tome II, p. 12.