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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/434

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mier des Machabées, et Josèphe, au 13. des Antiquités judaïques, en disent aussi quelque chose qui ne s’accorde pas tout à fait avec Appian. C’est à lui que je me suis attaché pour la narration que j’ai mise au premier acte[1], et pour l’effet du cinquième, que j’ai adouci du côté d’Antiochus. J’en ai dit la raison ailleurs[2]. Le reste sont des épisodes d’invention, qui ne sont pas incompatibles avec l’histoire, puisqu’elle ne dit point ce que devint Rodogune après la mort de Démétrius, qui vraisemblablement l’amenoit en Syrie prendre possession de sa couronne. J’ai fait porter à la pièce le nom de cette princesse plutôt que celui de Cléopatre, que je n’ai même osé nommer dans mes vers, de peur qu’on ne confondît cette reine de Syrie avec cette fameuse princesse d’Égypte qui portoit le même nom, et que l’idée de celle-ci, beaucoup plus connue que l’autre, ne semât une dangereuse occupation parmi les auditeurs.

On m’a souvent fait une question à la cour[3] : quel étoit celui de mes poèmes que j’estimois le plus ; et j’ai trouvé tous ceux qui me l’ont faite si prévenus en faveur de Cinna ou du Cid, que je n’ai jamais osé déclarer toute la tendresse que j’ai toujours eue pour celui-ci, à qui j’aurois volontiers donné mon suffrage, si je n’avois craint de manquer, en quelque sorte, au respect que je devois à ceux que je voyois pencher d’un autre côté. Cette préférence est peut-être en moi un effet de ces inclinations aveugles qu’ont beaucoup de pères pour quelques-uns de leurs enfants plus que pour les autres ; peut-être y entre-t-il un peu d’amour-propre, en ce que cette tragédie me semble être un peu plus à moi que

  1. Dans les scènes i et iv.
  2. Voyez le Discours de la tragédie, tome I, p. 79 et 80.
  3. Var. (édit. de 1660) : dans la cour.