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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/114

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On m’annonçait également que Narvaez venait occuper la ville de Cempoal qui est tout près de la Veracruz ; qu’on croyait, connaissant ses mauvaises intentions, qu’il viendrait attaquer mes hommes. On me disait que les Indiens gagnés à sa cause abandonnaient la ville pour ne pas combattre contre les nôtres et se réfugiaient dans la montagne près d’un cacique vassal de Votre Altesse et notre ami, et qu’ils pensaient rester là jusqu’à ce que je leur envoyasse dire ce qu’il fallait faire. Lorsque je vis le grand dommage qui commençait à se produire et comment on se révoltait par suite des exhortations de Narvaez, je pensai que me rendant sur les lieux il me serait plus facile d’apaiser le mouvement, car en me voyant les Indiens n’oseraient pas se soulever. Je pensais aussi pouvoir en imposer à Narvaez, pour l’arrêter dans la mauvaise voie et faire cesser le scandale de sa conduite. Je partis donc de Mexico ce jour même, laissant notre demeure fortifiée et bien approvisionnée de maïs et d’eau avec cinq cents hommes et de l’artillerie pour la défendre. Je partis avec soixante-dix de mes hommes, accompagné de quelques seigneurs de la cour de Muteczuma. Je laissai mes instructions à l’empereur, lui rappelant bien qu’il s’était déclaré le vassal de Votre Altesse et qu’il était sur le point de recevoir de Votre Majesté la récompense des services qu’il lui avait rendus ; je lui recommandai les Espagnols que je laissai derrière moi, ainsi que l’or et les bijoux qu’il m’avait donnés pour nous et pour Votre Altesse. Je lui dis que j’allais voir quelle espèce de gens étaient ceux qui venaient d’arriver ; que j’ignorais d’où ils venaient, et que ce ne pouvait être que de méchantes gens et non des sujets de Votre Altesse. Le prince me promit de veiller à ce que mes hommes ne manquassent de rien, de prendre sous sa garde les trésors que j’avais réunis pour Votre Majesté et que ceux de ses sujets qui venaient avec moi, me porteraient tant que la route passerait sur ses dépendances et me feraient donner tout ce dont j’aurais besoin ; et il me priait de lui faire savoir si ces hommes étaient de mauvaises gens, parce qu’il assemblerait de suite une armée pour les combattre elles chasser du pays.

Je le remerciai vivement, lui promis que Votre Altesse lui