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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/17

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ix
préface


Marina, son interprète, sa maîtresse et son amie. Elle appartenait à une grande famille indienne ; elle était princesse, elle était jeune, belle, intelligente, et pendant son existence près de Cortes, jamais créature humaine ne se fondit en un pareil dévouement.

Qu’il ne parlât point d’elle dans sa première lettre, cela se comprend ; il ne connaissait alors aucune de ses qualités, il pouvait au besoin la confondre avec les jolies filles que les caciques prodiguaient à ses soldats ; mais plus tard, comment ne rappelle-t-il même pas le nom de cette charmante créature que tout le Mexique admirait, qui ne le quitta jamais d’une seconde, qui fut son inspiratrice, son porte-parole et son ange gardien ! Ce fut elle, en effet, qui entama les premières négociations avec les indigènes ; qui lui dénonça les espions tlascaltecs venus pour observer son camp et dont le succès eût amené le massacre de sa troupe ; ce fut elle qui découvrit le complot de Cholula, où il eût infailliblement péri. Elle était à ses côtés, lors des batailles sanglantes de Mexico, et c’est avec lui qu’elle échappa au désastre de la nuit triste. Pendant les trois mois du siège de la grande ville, elle assista, compagne inséparable, à plus de cent combats, transmettant les ordres du conquérant à ses alliés et ses propositions aux Indiens ennemis ; et la ville prise, saccagée, détruite, elle part avec Cortes pour cette folle expédition du Honduras qui dura deux ans.

Eh ! bien, il ne lui consacre pas une ligne !

En somme, la conquête de Cortes qui donna à l’Espagne un empire de cinq cents lieues de diamètre du nord au sud et de quatre cents de l’est à l’ouest, coûta au Mexique plus de dix millions d’êtres humains emportés par la guerre, les maladies et les mauvais traitements ; de sorte que cet