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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/178

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chairs et de celles des Tlascaltecs ; et l’un d’eux prit quelques galettes de maïs qu’il nous lança en disant : « Prenez et mangez si vous avez faim ; pour nous, nous n’avons nul besoin. » Puis ils commencèrent à pousser leurs cris de guerre et la lutte recommença.

Comme je n’étais venu à Tacuba que dans l’espoir de m’entretenir avec les Mexicains et m’éclairer sur leurs projets, que ma présence n’avait plus de motif, au bout de six jours je résolus de retourner à Tezcoco pour hâter la construction de mes brigantins et les lancer au plus vite sur les eaux du lac. Le jour de notre départ, nous allâmes coucher à Cuautitlan, suivis de loin par les ennemis : de temps à autre ma cavalerie les chargeait et me ramenait des prisonniers. Le jour suivant, nous poursuivions notre route, et les Indiens voyant que nous ne songions pas à les attaquer, crurent que nous avions peur et se réunissant en grand nombre ils tombèrent sur notre arrière-garde. Ce que voyant, je commandai à mes gens de pied de continuer leur marche sans s’arrêter ; je mis à leur suite cinq cavaliers, j’en gardai vingt près de moi, j’en envoyai six autres en embuscade sur la droite, six autres sur la gauche, cinq autres encore d’un côté et les trois derniers d’un autre côté, avec ordre, lorsque l’ennemi s’avancerait nous croyant tous en avant, de tomber sur lui au cri que je pousserais de Santiago. Lorsqu’il fut temps je donnai le signal ; nous commençâmes à les charger. La poursuite se continua pendant deux lieues sur une plaine unie comme la main, ce qui était un spectacle des plus réjouissants. Un grand nombre de Mexicains périrent en cette rencontre de la main de nos alliés et des nôtres, et cela les refroidit si bien, qu’ils renoncèrent à nous suivre. Pour nous, ayant tourné bride, nous rejoignîmes bientôt la troupe. Nous allâmes passer la nuit dans un joli village appelé Oculman qui se trouve à deux lieues de Tezcoco, et d’où nous partîmes le lendemain pour arriver à la ville vers les midi. Nous y fûmes reçus par le grand alguazil mon capitaine et ses gens, qui tous se réjouirent fort de notre retour, car depuis le jour de notre départ ils n’avaient eu de nous aucune nouvelle et étaient fort désireux d’en avoir. Le lendemain de notre arrivée, les sei-