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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/185

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hommes ; quand je vis la faute qu’ils avaient commise, et qu’en nous emparant de ces deux pics, nous pourrions faire beaucoup de mal à nos adversaires, je commandai sans bruit à l’un de mes capitaines de monter rapidement avec sa troupe et de s’emparer du pic le plus abrupt qu’on venait d’abandonner. Il y réussit. Pour moi, je m’élançai sur la colline, là où s’étaient groupés la plupart des combattants ; grâce à Dieu, je m’emparai de l’un des côtés de la place, d’où je gagnai une hauteur, de niveau avec celle où les Indiens se battaient, hauteur dont la prise semblait impossible, au moins, sans courir de grands dangers ; cependant, mon capitaine avait planté sa bannière sur la pointe du pic et de là commençait à foudroyer les ennemis à coups d’arbalètes et d’arquebuses. Ceux-ci voyant le mal que nous leur faisions, et considérant la partie perdue, nous firent signe qu’ils se rendaient et mirent bas les armes.

Comme j’ai toujours pour principe de faire comprendre à ces gens que je ne leur veux aucun mal, quelque coupables qu’ils soient ; que je préfère les attirer au service de Votre Majesté (ce qu’ils comprennent très bien, étant fort intelligents), je fis cesser le combat.

Ils vinrent à moi et je les reçus fort bien. Bref, quand ils virent comment je me conduisais avec eux, ils le firent savoir à ceux de l’autre colline qui, quoique victorieux, résolurent de se déclarer sujets de Votre Majesté et vinrent me demander pardon du passé.

Je restai deux jours chez cette population des Peñoles ; de là, j’envoyai mes blessés à Tezcoco et je partis ; j’arrivai vers les dix heures à Huastepec dont j’ai parlé plus haut, et nous allâmes loger dans la maison de campagne du seigneur de l’endroit, où il y eut de la place pour nous tous. Cette campagne est la plus grande, la plus belle, la plus charmante que nous ayons jamais vue. Elle a deux lieues de tour, un joli ruisseau l’arrose et de-ci, de-là, à intervalles rapprochés, s’élèvent des pavillons entourés de jardins d’une fraîcheur délicieuse ; ici croissent tous les arbres à fruits de la contrée, et plus loin poussent toutes les plantes et fleurs odoriférantes. Il ne se peut rien voir de plus beau, et de plus digne d’admiration que cette campagne. Nous