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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/186

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nous y reposâmes tout un jour, comblés de soins par les naturels. Le jour suivant, nous partîmes et nous arrivâmes à huit heures dans un grand village appelé Yautepec, où nous attendait une nombreuse troupe d’ennemis.

Quand ils nous aperçurent, soit terreur, soit désir de nous tromper, ils semblèrent nous faire des signaux de paix ; puis, tout à coup, ils prirent la fuite abandonnant le village. Comme rien ne m’y retenait, je les poursuivis avec mes trente chevaux l’espace de deux lieues, jusqu’à les enfermer dans un autre village appelé Xilotepec où nous en tuâmes un grand nombre. Nous prîmes les gens de ce village par surprise, car nous arrivâmes avant leurs courriers ; nous en tuâmes aussi quelques-uns, nous prîmes des femmes et des enfants et le reste prit la fuite. Je restai deux jours dans ce village, espérant que le cacique viendrait se déclarer sujet de Votre Majesté, et comme il ne vint pas, je fis en m’en allant incendier le village. Au moment de partir m’arrivèrent quelques habitants notables du village précédent appelé Yautepec, pour me prier de leur pardonner et de les recevoir comme serviteurs de Votre Majesté. Je leur accordai leur demande de bonne volonté, car ils avaient été sévèrement châtiés.

Ce même jour, j’arrivai à neuf heures, en vue d’une place très forte appelée Cuernavaca, où se trouvait une foule de gens de guerre. Cette ville était naturellement fortifiée et entourée de rochers et de barrancas (étroites et profondes vallées) dont quelques-unes avaient plus de soixante pieds de profondeur ; il n’y avait aucun accès pour les cavaliers, sauf deux passages que nous ne connaissions pas, et il nous fallait de plus, pour les atteindre, faire un circuit de plus d’une lieue et demie. On pouvait aussi y entrer par des ponts de bois ; mais on en avait enlevé les tabliers et eussions-nous été dix fois plus nombreux, que cela ne nous eût servi de rien. Lorsque nous arrivâmes en face d’eux, ils nous tirèrent à loisir des dards, des flèches et des pierres ; pendant que nous étions là, ne sachant que faire, un Indien de Tlascala passa par un sentier fort dangereux sans que personne le vît. Quand les gens de Cuernavaca l’aperçurent, ils crurent que les Espagnols entraient derrière lui, et pleins