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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/236

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nous accorda comme toujours la victoire et nous regagnâmes nos quartiers assez tard.

Le jour suivant, nous nous préparions à partir pour Mexico, lorsque vers les neuf heures nous vîmes des colonnes de fumée s’élever des pyramides de Tlaltelolco, le grand marché de la ville ; nous ne savions ce que cela voulait dire, car cette fumée était beaucoup plus considérable que celle produite par l’encens que les Indiens avaient coutume de brûler en l’honneur de leurs idoles et nous supposâmes, sans oser le croire, que c’était Alvarado qui était arrivé jusque sur la place ; ce qui était vrai. Il est certain que, ce jour-là, Pedro de Alvarado et ses hommes se comportèrent le plus vaillamment du monde, car nous avions encore de ce côté, une foule de tranchées et de barricades à conquérir, et que l’élite des guerriers de la ville s’efforçaient de défendre. Comme il voyait que de notre côté, nous resserrions l’ennemi chaque jour davantage, il fit son possible pour arriver sur la place où les Mexicains avaient concentré leurs forces ; mais il ne put que s’en approcher et s’emparer de ces pyramides qui se trouvent aux environs du Marché. Les cavaliers se trouvèrent en grand danger et furent obligés de se retirer ; retraite pendant laquelle on leur blessa trois chevaux. Ce fut ainsi que Pedro de Alvarado et ses gens gagnèrent leur quartier. Pour nous, nous ne voulûmes pas même prendre l’unique tranchée et le seul canal qui nous séparassent du Marché et nous ne nous occupâmes que de combler et d’aplanir tous les mauvais pas. Les Mexicains nous poursuivirent dans notre retraite, ce qui leur coûta cher.

Le lendemain, de bonne heure, nous entrâmes dans la ville, et nous n’avions à nous emparer que d’une seule tranchée et de sa barricade pour arriver au Marché ; nous attaquâmes aussitôt ; un lieutenant et deux ou trois Espagnols se jetèrent à l’eau, ce que voyant les Mexicains abandonnèrent la barricade. On commença donc immédiatement à combler la tranchée et égaliser le terrain pour que les chevaux pussent passer ; lorsque tout fut prêt, Alvarado parut au bout de la rue avec quatre de ses cavaliers, ce qui nous causa la joie la plus grande que nous eussions éprouvée, car cet incident nous annonçait la fin pro-