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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/259

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Dans une de mes lettres, je disais à Votre Majesté que les habitants de ce pays me paraissaient beaucoup plus intelligents que ceux des îles, et que pour cette raison, il nous paraissait injuste de les astreindre aux mêmes travaux que ceux des îles ; et cependant, sans ce travail, les conquérants et les colons de cette Nouvelle-Espagne ne pourraient vivre. Et pour ne pas assujétir ainsi les Indiens sans que les Espagnols eussent à en souffrir, j’ai pensé que Votre Majesté pourrait appliquer au secours de ces Indiens une partie des rentes qui appartiennent à Votre Altesse, et que ces ressources leur fussent distribuées de la manière la plus équitable, comme j’en ai parlé plusieurs fois à Votre Majesté ; mais, vu les grandes et continuelles dépenses qu’entraîne le service de Votre Majesté, dépenses que nous devrions restreindre au lieu de les augmenter ; vu le temps qui s’est écoulé dans cette longue campagne, les dettes que nous avons contractées à ce sujet et le retard apporté dans les affaires par les ordres attendus de Votre Majesté ; et vu surtout les exigences des officiers de Votre Majesté et de tous les Espagnols, exigences auxquelles je ne pouvais me refuser ; je me suis trouvé forcé de livrer aux mains de mes compagnons les naturels et les seigneurs de ces contrées, pour que, jusqu’à nouvel ordre de votre part, ces naturels et leurs seigneurs livrassent aux Espagnols dont ils devenaient les serviteurs, tout ce qui était nécessaire à leur subsistance. Je pris ces décisions sur l’avis de personnes intelligentes et qui avaient l’expérience des choses du pays ; et l’on ne pouvait prendre une mesure qui fût plus à propos, tant pour l’entretien des Espagnols, que pour le maintien et le bon traitement des Indiens, suivant ce qu’auront à l’expliquer plus au long à Votre Majesté, les procureurs qui vont partir de la Nouvelle-Espagne. Pour les habitations et fermes destinées à Votre Majesté, nous avons choisi dans les provinces les plus riches et parmi les villes les plus belles. Je supplie Votre Majesté de vouloir bien approuver ce que j’ai cru devoir faire et me mander ce qui lui plaira le mieux.

Seigneur très Catholique : que Dieu, Notre Seigneur, conserve la vie et les États de votre personne royale, étende et accroisse le nombre de ses royaumes et seigneuries, autant que votre