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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/294

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Aussitôt cette ville conquise, je fis commencer la construction d’une forteresse dans la lagune, d’un côté de Mexico où mes brigantins pussent être abrités ; pour de là, courir sus à la ville s’il en était besoin et que je pusse à mon gré les envoyer au dehors ou les rappeler : ce qui fut fait. Cette construction est telle, que, quoiqu’ayant déjà vu bien des chantiers et des citadelles, je n’en ai pas vu qui l’égalent ; d’autres qui en ont vu davantage, l’affirment comme moi. Cette citadelle a, du côté de la lagune, deux tours très fortes avec leurs meurtrières et embrasures ; ces deux tours sont reliées par une construction formant trois nefs où se trouvent des brigantins avec entrées pour aller et venir dans la lagune. Tout ce bâtiment a également ses meurtrières, et tout auprès, du côté de la ville, se trouve une grande tour avec de nombreux logements dans le haut et le bas ; elle est construite pour l’offensive et la défensive. Je n’en dirai pas davantage à Votre Majesté, puisque je lui en enverrai le plan ; j’ajouterai néanmoins, que cette tour en notre pouvoir, nous il imposons de la paix et de la guerre, ayant en mains les navires et l’artillerie.

La construction de cette citadelle me parut remplir toutes les conditions de sécurité que je pouvais désirer, et voulant encourager l’extension de la ville, j’allai m’y installer avec tous les gens de ma compagnie. Je répartis les terrains entre les habitants, et à chacun des conquérants, au nom de Votre Majesté, je distribuai un lot selon l’importance de ses mérites, outre les Indiens que je lui accordai pour le servir. On a mis à construire des maisons une telle diligence, qu’il y en a quantité de terminées et que les autres avancent rapidement. Comme ces constructions se composent de pierres, chaux, bois et briques, que fabriquent les naturels qui sont de merveilleux architectes, je puis assurer Votre Majesté, que dans cinq ans, Mexico sera la ville la plus peuplée de beaux édifices qu’il y ait au monde. Le quartier des Espagnols est distinct du quartier des Indiens ; ils sont séparés par un canal ; mais toutes les rues qui y aboutissent ont des ponts de bois qui facilitent la circulation. Il y a deux grands marchés, l’un dans le quartier indien, l’autre dans le quartier espagnol ; on y trouve tous les produits que la con-