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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/310

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avait bien longtemps que j’étais oisif, et que par suite de la blessure de mon bras, je n’avais rien accompli pour le service de Votre Majesté. Quoique je ne fusse pas encore guéri, je résolus cependant d’entreprendre quelque chose et je partis de la ville de Mexico le 12 du mois d’octobre de l’année 1524 avec quelques piétons et cavaliers, gens de ma maison, amis et serviteurs et parmi eux Gonzalo de Salazar, Peralmirez et Chirino, facteur et commissaire-inspecteur de Votre Majesté ; j’emmenais aussi tous les seigneurs mexicains[1]. J’établis en mon lieu et place, chargé de la justice et du gouvernement, le trésorier compteur de Votre Majesté, le licencié Alonzo de Zuazo. Je laissai la ville bien pourvue d’artillerie, de munitions et d’hommes en nombre suffisant, les arsenaux également garnis de pièces et les brigantins tous parés dans leurs chantiers. Je laissai un gouverneur de la forteresse, avec tous les moyens d’attaque et de défense. Je quittai Mexico et j’arrivai à la ville del Espiritu Santo à cent dix lieues de là, et pendant que je m’occupais des affaires de cette ville, j’envoyai des émissaires dans les provinces de Tabasco et de Xicalanco pour annoncer mon arrivée aux caciques de ces provinces, les priant de venir me trouver, ou de m’envoyer des gens pour que je leur dise ce qu’ils auraient à faire et qu’ils leur rapportassent ce que j’avais décidé. Mes gens furent bien accueillis, et ils me ramenèrent sept ou huit personnes, connues pour avoir été déjà plusieurs fois accréditées comme ambassadeurs. Je leur parlai des choses sur lesquelles je voulais être informé ; ils me répondirent que sur la côte de la mer, de l’autre côté du Yucatan, près de la baie de l’Ascension, il y avait des Espagnols qui leur faisaient beaucoup de mal : car, non contents d’incendier les villages et de tuer des Indiens, ce qui avait amené l’abandon des lieux et la fuite des habitants dans les bois, ils avaient ruiné le commerce et les négociants. Les communications étaient rompues et il ne se faisait plus aucun trafic, très actif jusqu’alors et ruiné par leur faute. Ils m’énumérèrent, à ce sujet, toutes les villes et villages de la côte jusqu’à l’endroit où réside Pedrarias de Avila, gouverneur de Votre Majesté, et m’étalèrent la contrée

  1. Cortes emmenait plus de trois mille hommes, des musiciens, des pages, des femmes, des bouffons, un train de satrape.